La recherche propose une typologie des entreprises non conformistes, de leurs stratégies, leurs organisations, leurs comportements et leurs cultures, afin d’en appréhender le modèle de management. Elle s’appuie sur les études des cas des leaders actuels de la net-économie (Amazon, Yahoo ! !, Google, eBay, Cisco), qui ont été parfois considérés, par les milieux professionnels et financiers, comme postmodernes. Leurs réussites technologiques et financières ont d’ailleurs suscité, parmi les scientifiques et les praticiens, des interrogations sur l’efficience des modèles classiques de management et sur la nécessité de leur dépassement. Leur non conformisme affiché, ne relève-t-il que du seul discours masquant des idéologies et des comportements conventionnels ou recouvre-t-il des stratégies et des formes organisationnelles, mieux adaptées à l’incertitude et à la complexité de leurs environnements ? L'article dresse un état de l’art du concept polysémique de non conformisme, présente la problématique et la méthodologie de la recherche, puis en restitue et en discute les résultats.
Introduction
A l’occasion du centenaire de la parution de l’article fondateur de la théorie de la relativité, Einstein a été consacré " génie du non-conformisme " , en raison de " sa posture remarquable qui le différencie de la figure commune de l’intellectuel engagé, en ce sens qu’il ne prend ses ordres qu’auprès de sa propre raison, ne se laissant dicter sa conduite par aucune instance extérieure, ni tradition, ni famille de pensée, ni parti politique, ni religion ".
Cette indépendance d’esprit radicale et cette volonté réfléchie de non-conformisme constitueraient le principal levier de son génie créatif. Conformément à cette définition, l’entreprise non conformiste serait donc une organisation innovante caractérisée par une stratégie, une organisation, des valeurs socioculturelles et des comportements non conformes aux théories standard et aux pratiques en usage sur ses marchés et dans son milieu professionnel. Les décisions et les actions de ses acteurs seraient ainsi sous-tendues par un individualisme méthodologique excluant tout isomorphisme institutionnel et organisationnel (Powell & Di Maggio, 1983), tout encastrement structurel (Granovetter, 1985), toute relation de contagion (Freeman, 1989) par son environnement macro-social. Mais l’entreprise non conformiste ne serait-elle qu’une organisation s’efforçant de s’affranchir du paradigme anglo-saxon dominant fondé sur les lois du marché ? Ne serait-elle qu’un processus organisationnel induit par une " stratégie de rupture " ? Ou ne serait-elle pas plutôt une organisation postmoderne régie un individualisme méthodologique plus complexe (Dupuy, 1992).
La recherche propose une typologie des entreprises non conformistes, de leurs stratégies, leurs organisations, leurs comportements et leurs cultures, afin d’en caractériser les principes de management. Elle s’appuie sur les études des cas des leaders actuels de la net-économie (Amazon, Yahoo !, Google, eBay, Cisco), qui ont été parfois considérées par les milieux professionnels et financiers comme non conformistes. Leurs réussites technologiques et financières ont d’ailleurs suscité, parmi les scientifiques et les praticiens, des interrogations sur l’efficience de certains modèles académiques de management et sur la nécessité de leur dépassement : leur non conformisme affiché ne relève-t-il que du seul discours masquant des modèles d’organisation conventionnels ou recouvre-t-il des formes organisationnelles avant-gardistes mieux adaptées à l’incertitude et à la complexité de leurs environnements ?
La communication dresse un état de l’art du concept polysémique de non conformisme, présente la problématique et la méthodologie de la recherche, puis en restitue et en discute les résultats.
Cette indépendance d’esprit radicale et cette volonté réfléchie de non-conformisme constitueraient le principal levier de son génie créatif. Conformément à cette définition, l’entreprise non conformiste serait donc une organisation innovante caractérisée par une stratégie, une organisation, des valeurs socioculturelles et des comportements non conformes aux théories standard et aux pratiques en usage sur ses marchés et dans son milieu professionnel. Les décisions et les actions de ses acteurs seraient ainsi sous-tendues par un individualisme méthodologique excluant tout isomorphisme institutionnel et organisationnel (Powell & Di Maggio, 1983), tout encastrement structurel (Granovetter, 1985), toute relation de contagion (Freeman, 1989) par son environnement macro-social. Mais l’entreprise non conformiste ne serait-elle qu’une organisation s’efforçant de s’affranchir du paradigme anglo-saxon dominant fondé sur les lois du marché ? Ne serait-elle qu’un processus organisationnel induit par une " stratégie de rupture " ? Ou ne serait-elle pas plutôt une organisation postmoderne régie un individualisme méthodologique plus complexe (Dupuy, 1992).
La recherche propose une typologie des entreprises non conformistes, de leurs stratégies, leurs organisations, leurs comportements et leurs cultures, afin d’en caractériser les principes de management. Elle s’appuie sur les études des cas des leaders actuels de la net-économie (Amazon, Yahoo !, Google, eBay, Cisco), qui ont été parfois considérées par les milieux professionnels et financiers comme non conformistes. Leurs réussites technologiques et financières ont d’ailleurs suscité, parmi les scientifiques et les praticiens, des interrogations sur l’efficience de certains modèles académiques de management et sur la nécessité de leur dépassement : leur non conformisme affiché ne relève-t-il que du seul discours masquant des modèles d’organisation conventionnels ou recouvre-t-il des formes organisationnelles avant-gardistes mieux adaptées à l’incertitude et à la complexité de leurs environnements ?
La communication dresse un état de l’art du concept polysémique de non conformisme, présente la problématique et la méthodologie de la recherche, puis en restitue et en discute les résultats.
1. Le non conformisme, un concept non conformiste
L’analyse du concept de non conformisme fait appel à des théories relevant de plusieurs champs académiques et à des pratiques applicables à des terrains et à des situations variés.
1.1. L’entreprise non conformiste, un groupe contestataire
Le " conformisme logique ", selon Durkheim (1912), est " l’orchestration des catégories de perception de l’espace social, qui, étant ajustée aux divisions de l’ordre établi (et par là, aux intérêts de ceux qui la dominent), s’impose avec toutes les apparences de la nécessité objective ". Le non conformisme est donc, selon Durkheim, un " anticonformisme ", en rupture avec la stratégie de domination exercée par les principaux acteurs d’un milieu social, au nom d’un principe charismatique (l’héroïsme ou le sacré), d’une tradition ou d’une rationalité légale, selon la classification de Weber. Il est assimilable à un " contre-pouvoir ", défini par Foucault (1975), comme " un phénomène essentiellement politique visant à libérer le plus grand nombre d’une objectivation insidieuse des comportements sociaux ". Bien qu’exprimant une volonté de rupture avec l’ordre établi, il n’est qu’une " donnée relationnelle, relative et subjective, s’exerçant en fonction des distances entre les positions perçues des différents acteurs au regard de l’enjeu d’un pouvoir " (Durkheim, 1912). L’anticonformisme s’impose d’autant mieux face à un ordre " tenu pour acquis " et socialement accepté. Cette réaction face aux règles partagées par les membres dominants d‘un milieu, est d’autant plus perceptible qu’elle intervient dans les situations de crise ou face à des situations nouvelles, au cours desquelles, les acteurs non conformistes taxent ouvertement le conformisme, de " conservatisme ", d’" archaïsme ", d’ " immobilisme ", d’" inertie ", de " réification", d’ " impuissance ", de " résistance au changement "…
Suivant cette acception, une entreprise non conformiste s’efforce de s’affranchir, par sa stratégie et/ou par ses comportements, de la domination de groupes influents de fournisseurs, clients, concurrents, partenaires, autorités de tutelle…, exercée sur son marché ou dans son milieu professionnel, sous couvert de règles du jeu présentées comme légitimes, de théories académiques dites standards ou de pratiques considérées comme efficientes. Cette stratégie informelle de contre-pouvoir revêt néanmoins un caractère subjectif et spontané, à priori sans intention de reconquête du pouvoir.
1.1. L’entreprise non conformiste, un groupe contestataire
Le " conformisme logique ", selon Durkheim (1912), est " l’orchestration des catégories de perception de l’espace social, qui, étant ajustée aux divisions de l’ordre établi (et par là, aux intérêts de ceux qui la dominent), s’impose avec toutes les apparences de la nécessité objective ". Le non conformisme est donc, selon Durkheim, un " anticonformisme ", en rupture avec la stratégie de domination exercée par les principaux acteurs d’un milieu social, au nom d’un principe charismatique (l’héroïsme ou le sacré), d’une tradition ou d’une rationalité légale, selon la classification de Weber. Il est assimilable à un " contre-pouvoir ", défini par Foucault (1975), comme " un phénomène essentiellement politique visant à libérer le plus grand nombre d’une objectivation insidieuse des comportements sociaux ". Bien qu’exprimant une volonté de rupture avec l’ordre établi, il n’est qu’une " donnée relationnelle, relative et subjective, s’exerçant en fonction des distances entre les positions perçues des différents acteurs au regard de l’enjeu d’un pouvoir " (Durkheim, 1912). L’anticonformisme s’impose d’autant mieux face à un ordre " tenu pour acquis " et socialement accepté. Cette réaction face aux règles partagées par les membres dominants d‘un milieu, est d’autant plus perceptible qu’elle intervient dans les situations de crise ou face à des situations nouvelles, au cours desquelles, les acteurs non conformistes taxent ouvertement le conformisme, de " conservatisme ", d’" archaïsme ", d’ " immobilisme ", d’" inertie ", de " réification", d’ " impuissance ", de " résistance au changement "…
Suivant cette acception, une entreprise non conformiste s’efforce de s’affranchir, par sa stratégie et/ou par ses comportements, de la domination de groupes influents de fournisseurs, clients, concurrents, partenaires, autorités de tutelle…, exercée sur son marché ou dans son milieu professionnel, sous couvert de règles du jeu présentées comme légitimes, de théories académiques dites standards ou de pratiques considérées comme efficientes. Cette stratégie informelle de contre-pouvoir revêt néanmoins un caractère subjectif et spontané, à priori sans intention de reconquête du pouvoir.
1.2. L’entreprise non conformiste, un acteur désocialisé
Selon Goffman (1971), les acteurs d’une organisation sont leurs " propres geôliers ", car ils doivent refléter, par leurs discours et leurs comportements, une image (self) ou une façade (front) à la fois cohérentes dans le temps et dans l’espace et conformes aux codes (ou ordre rituel) de leur environnement social. L’acteur non conformiste prend donc le risque de perdre son statut social (la " face " selon Goffman) afin de se soustraire à un modèle d’action préétabli assimilable à une routine.
Bourdieu (1979) fonde le conformisme sur un " jugement d’attribution ", qui assigne quelqu’un à une classe sociale et s’assigne du même coup à une autre classe. Ce système de classification (ou " schémas classificatoires ") ne repose pas sur des principes formalisés et ne suppose pas une référence consciente à des indices explicites, mais " se construit " dans la confrontation avec les autres acteurs. La relation entre les caractéristiques pertinentes (ou objectives) de la condition économique et sociale des acteurs observés et les signes distinctifs (subjectifs) de leurs positions dans l’espace social, repose sur un principe générateur, qualifié " d’habitus " par Bourdieu (1979).
" Structure structurante, qui organise les pratiques et la perception des pratiques, l’habitus est aussi structure structurée : le principe de division en classes logiques qui organise la perception du monde social est lui-même le produit de la division en classes sociales ". L’identité sociale se définissant dans la différence, " les luttes pour la conquête de positions sociales et de biens économiques sont inséparablement des luttes symboliques pour l’appropriation de signes distinctifs " (Bourdieu, 1979, p.278). Suivant cette définition, le non conformisme d’une entreprise, se traduit par la production de symboles (enseigne, marque, schémas de couleurs originaux…, mais aussi, discours et comportements décalés) la distinguant (avec ses salariés) des principaux acteurs de son marché (les clients, les fournisseurs et les concurrents) et de son milieu (les autres parties prenantes).
Mais, selon Bourdieu, le non conformisme vise également, de façon intentionnelle ou non, à briser les routines, qui, encadrant l’action dans le temps et l’espace, sont facilitantes pour l’action quotidienne (" l’exploitation ", au sens de March), mais contraignantes pour l’action créative (" l’exploration "). Le non conformisme induit des décisions et des comportements permettant de s’affranchir de certaines résistances au changement, liées à l’histoire de l’entreprise dans son environnement socioprofessionnel, et induites par la tendance des institutions et des organisations à un certain " isomorphisme " (DiMaggio & Powell, 1983) ou à un " encastrement structurel " (Granovetter, 1985) dans son milieu. Cette tendance suit des " logiques dominantes " (Prahalad & Bettis, 1986), qui s’imposent aux schémas cognitifs des décideurs, et expliquent pourquoi ces derniers préfèrent généralement les processus d’adaptation aux changements radicaux. Les représentations sociales mobilisées dans l’action constituent une réalité du second ordre qui constitue un frein au changement (Watzlawick & al, 1975). " Les gains, pour les individus, d’une adaptation rapide aux codes sont compensées par les pertes du second ordre provenant du fait que le code ne peut apprendre qu’à partir des individus déviants ",… " les collectifs doivent se méfier, non se féliciter, du consensus, car c’est par les individus qui sont non conformes (sic), que le savoir des collectifs peut espérer progresser ", soutient March (1996), introduisant la notion controversée de " folie organisationnelle ".
L’entreprise non conformiste prend ainsi le risque d’une certaine désocialisation, afin de se soustraire aux " contraintes exogènes " de son milieu ( Giddens), et ainsi, de libérer ses capacités de création.
Selon Goffman (1971), les acteurs d’une organisation sont leurs " propres geôliers ", car ils doivent refléter, par leurs discours et leurs comportements, une image (self) ou une façade (front) à la fois cohérentes dans le temps et dans l’espace et conformes aux codes (ou ordre rituel) de leur environnement social. L’acteur non conformiste prend donc le risque de perdre son statut social (la " face " selon Goffman) afin de se soustraire à un modèle d’action préétabli assimilable à une routine.
Bourdieu (1979) fonde le conformisme sur un " jugement d’attribution ", qui assigne quelqu’un à une classe sociale et s’assigne du même coup à une autre classe. Ce système de classification (ou " schémas classificatoires ") ne repose pas sur des principes formalisés et ne suppose pas une référence consciente à des indices explicites, mais " se construit " dans la confrontation avec les autres acteurs. La relation entre les caractéristiques pertinentes (ou objectives) de la condition économique et sociale des acteurs observés et les signes distinctifs (subjectifs) de leurs positions dans l’espace social, repose sur un principe générateur, qualifié " d’habitus " par Bourdieu (1979).
" Structure structurante, qui organise les pratiques et la perception des pratiques, l’habitus est aussi structure structurée : le principe de division en classes logiques qui organise la perception du monde social est lui-même le produit de la division en classes sociales ". L’identité sociale se définissant dans la différence, " les luttes pour la conquête de positions sociales et de biens économiques sont inséparablement des luttes symboliques pour l’appropriation de signes distinctifs " (Bourdieu, 1979, p.278). Suivant cette définition, le non conformisme d’une entreprise, se traduit par la production de symboles (enseigne, marque, schémas de couleurs originaux…, mais aussi, discours et comportements décalés) la distinguant (avec ses salariés) des principaux acteurs de son marché (les clients, les fournisseurs et les concurrents) et de son milieu (les autres parties prenantes).
Mais, selon Bourdieu, le non conformisme vise également, de façon intentionnelle ou non, à briser les routines, qui, encadrant l’action dans le temps et l’espace, sont facilitantes pour l’action quotidienne (" l’exploitation ", au sens de March), mais contraignantes pour l’action créative (" l’exploration "). Le non conformisme induit des décisions et des comportements permettant de s’affranchir de certaines résistances au changement, liées à l’histoire de l’entreprise dans son environnement socioprofessionnel, et induites par la tendance des institutions et des organisations à un certain " isomorphisme " (DiMaggio & Powell, 1983) ou à un " encastrement structurel " (Granovetter, 1985) dans son milieu. Cette tendance suit des " logiques dominantes " (Prahalad & Bettis, 1986), qui s’imposent aux schémas cognitifs des décideurs, et expliquent pourquoi ces derniers préfèrent généralement les processus d’adaptation aux changements radicaux. Les représentations sociales mobilisées dans l’action constituent une réalité du second ordre qui constitue un frein au changement (Watzlawick & al, 1975). " Les gains, pour les individus, d’une adaptation rapide aux codes sont compensées par les pertes du second ordre provenant du fait que le code ne peut apprendre qu’à partir des individus déviants ",… " les collectifs doivent se méfier, non se féliciter, du consensus, car c’est par les individus qui sont non conformes (sic), que le savoir des collectifs peut espérer progresser ", soutient March (1996), introduisant la notion controversée de " folie organisationnelle ".
L’entreprise non conformiste prend ainsi le risque d’une certaine désocialisation, afin de se soustraire aux " contraintes exogènes " de son milieu ( Giddens), et ainsi, de libérer ses capacités de création.
1.3. L’entreprise non conformiste, une organisation paradoxale
Dans des environnements de plus en plus institutionnalisés, au sens de Meyer & Rowan (1980), les structures, les procédures et les idéologies des entreprises doivent refléter les normes de leurs environnements techniques (orientées vers l’efficience et l’efficacité) et de leurs environnements sociaux (régis par des rituels d’acceptation). Cette double contrainte implique une certaine " hypocrisie " de la part des dirigeants des entreprises (Brunsson, 1989) : ils doivent par exemple licencier pour des raisons économiques tout en tenant un discours social, réduire leur pression fiscale tout en promouvant une image sociétale... L’entreprise non conformiste s’efforce de lever ce dilemme, au risque d’être taxée de " management paradoxal " : ce dernier se présente sous forme de discours et/ou de comportements incohérents au regard des normes sociales, car contradictoires " avec ce qui se dit ou se fait " (Cialdini, 1993). Leurs acteurs sont jugés irrationnels, car ils ne se conforment pas aux principes et aux usages de la collectivité ou car ils ne participent pas à ses buts communs. Cette irrationalité (apparente ou réelle) traduit une absence ou une insuffisance de " contrôle réflexif " (Giddens, 1984), défini comme une capacité à régler ses discours et ses comportements en fonction des attentes des " membres compétents ou influents de la société ".
L’irrationalité d’une entreprise peut trouver des sources ou revêtir des formes multiples : vision de l’avenir non conforme aux scénarios partagés par les experts d’une profession, stratégies exagérément ambitieuses ou risquées, organisation apparemment inefficiente ou inefficace, comportements illicites, incohérents ou non conformes aux discours de la direction, identité et valeurs décalées par rapport à celles d’un métier ou d’un environnement socio-culturel… Afin de limiter certains effets pervers de la désocialisation (Giddens, 1984), les dirigeants des entreprises non conformistes s’attachent le plus souvent à rationaliser a posteriori leurs décisions et leurs actions.
Dans des environnements de plus en plus institutionnalisés, au sens de Meyer & Rowan (1980), les structures, les procédures et les idéologies des entreprises doivent refléter les normes de leurs environnements techniques (orientées vers l’efficience et l’efficacité) et de leurs environnements sociaux (régis par des rituels d’acceptation). Cette double contrainte implique une certaine " hypocrisie " de la part des dirigeants des entreprises (Brunsson, 1989) : ils doivent par exemple licencier pour des raisons économiques tout en tenant un discours social, réduire leur pression fiscale tout en promouvant une image sociétale... L’entreprise non conformiste s’efforce de lever ce dilemme, au risque d’être taxée de " management paradoxal " : ce dernier se présente sous forme de discours et/ou de comportements incohérents au regard des normes sociales, car contradictoires " avec ce qui se dit ou se fait " (Cialdini, 1993). Leurs acteurs sont jugés irrationnels, car ils ne se conforment pas aux principes et aux usages de la collectivité ou car ils ne participent pas à ses buts communs. Cette irrationalité (apparente ou réelle) traduit une absence ou une insuffisance de " contrôle réflexif " (Giddens, 1984), défini comme une capacité à régler ses discours et ses comportements en fonction des attentes des " membres compétents ou influents de la société ".
L’irrationalité d’une entreprise peut trouver des sources ou revêtir des formes multiples : vision de l’avenir non conforme aux scénarios partagés par les experts d’une profession, stratégies exagérément ambitieuses ou risquées, organisation apparemment inefficiente ou inefficace, comportements illicites, incohérents ou non conformes aux discours de la direction, identité et valeurs décalées par rapport à celles d’un métier ou d’un environnement socio-culturel… Afin de limiter certains effets pervers de la désocialisation (Giddens, 1984), les dirigeants des entreprises non conformistes s’attachent le plus souvent à rationaliser a posteriori leurs décisions et leurs actions.
1.4. L’entreprise non conformiste, une communauté passionnelle
L’entreprise non conformiste peut être également considérée comme un " système imaginaire, simultanément acteur et levier de l’action organisationnelle, dans laquelle la subjectivité et l’affectivité constituent des instruments de gestion " (Martinet, 2002). Suivant cette définition, le non conformisme d’une entreprise peut contribuer à mobiliser l’intelligence émotionnelle des acteurs internes et externes qui lui sont liés. L’intelligence émotionnelle est définie comme " l’habileté à contrôler ses émotions et sensations, ainsi que celles des autres, afin de guider leurs pensées et leurs actions " (Goleman & Boyatzis, 2005). Le non conformisme traduit une certaine " dissonance cognitive " avec la logique dominante (Festinger, 1957), mais il fait preuve en revanche de " résonance " aux émotions des acteurs en situation de consommation ou de travail. Cette capacité - exprimée généralement par une confiance en soi, un enthousiasme, une originalité, une empathie…- contribue à restaurer la motivation et/ou la confiance parmi ces acteurs. Le non conformisme devient alors une stratégie d’attraction et de fidélisation d’acteurs socio-économiques (clients, fournisseurs, salariés, investisseurs, partenaires, groupes de pression…), dont les interactions peuvent être créateurs de valeur pour l’entreprise. Le discours non conformiste peut alors devenir manipulatoire, exprimant par exemple des idéologies - propres à susciter la passion - fondatrices d’un ordre social plus moderne, solidaire et/ou équitable (Brunsson, 1989).
Cette brève revue de littérature montre le caractère à la fois hétérogène et évolutif du concept de non conformisme appliqué à l’entreprise, puisqu’il peut être investi par des courants théoriques variés sans être réductible à l’un d’entre eux.
L’entreprise non conformiste peut être également considérée comme un " système imaginaire, simultanément acteur et levier de l’action organisationnelle, dans laquelle la subjectivité et l’affectivité constituent des instruments de gestion " (Martinet, 2002). Suivant cette définition, le non conformisme d’une entreprise peut contribuer à mobiliser l’intelligence émotionnelle des acteurs internes et externes qui lui sont liés. L’intelligence émotionnelle est définie comme " l’habileté à contrôler ses émotions et sensations, ainsi que celles des autres, afin de guider leurs pensées et leurs actions " (Goleman & Boyatzis, 2005). Le non conformisme traduit une certaine " dissonance cognitive " avec la logique dominante (Festinger, 1957), mais il fait preuve en revanche de " résonance " aux émotions des acteurs en situation de consommation ou de travail. Cette capacité - exprimée généralement par une confiance en soi, un enthousiasme, une originalité, une empathie…- contribue à restaurer la motivation et/ou la confiance parmi ces acteurs. Le non conformisme devient alors une stratégie d’attraction et de fidélisation d’acteurs socio-économiques (clients, fournisseurs, salariés, investisseurs, partenaires, groupes de pression…), dont les interactions peuvent être créateurs de valeur pour l’entreprise. Le discours non conformiste peut alors devenir manipulatoire, exprimant par exemple des idéologies - propres à susciter la passion - fondatrices d’un ordre social plus moderne, solidaire et/ou équitable (Brunsson, 1989).
Cette brève revue de littérature montre le caractère à la fois hétérogène et évolutif du concept de non conformisme appliqué à l’entreprise, puisqu’il peut être investi par des courants théoriques variés sans être réductible à l’un d’entre eux.
2. Une problématique et une méthodologie de recherches académiques
L’état de l’art laisse apparaître qu’une entreprise non conformiste peut présenter les traits d’un groupe contestataire, d’un acteur désocialisé, d’une organisation paradoxale et/ou d’une communauté passionnelle. La recherche s’efforce de montrer :
- que cette typologie exploratoire est pertinente,
- que ces traits ne sont pas mutuellement exclusifs, mais cumulatifs,
- qu’ils sont représentatifs des organisations dites post-modernes.
Le traitement de la problématique fait appel à la méthode qualitative des études de cas multiples (ou multi-sites), dont les validités interne et externe ont été attestées notamment par les travaux de Yin et de Stake. Ces études de cas s’efforcent de tester des hypothèses complexes, par la triangulation de multiples données recueillies sur des terrains fragmentés et en mouvement. Le terrain choisi est celui du secteur de l’économie internet, qui a émergé au cours des années 1990, et, après avoir traversé une période d’incertitude au début des années 2000, connaît à nouveau un développement rapide. Les entreprises de ce secteur d’activité (appelées start-up, dot.com, e.tailers, e.traders…) ont été fréquemment qualifiées de "non conformistes " (Maitre & Aladjidi, 1999), car elles s’efforcent notamment de fonder une " nouvelle économie " (ou économie virtuelle) en contestant le conformisme de " l’économie traditionnelle " (ou économie réelle).
Les dot.com observées, ont été sélectionnées en fonction des quatre critères suivants :
- leurs images reconnues (par des analystes stratégiques et financiers) d’entreprises non conformistes,
- leurs capacités, malgré ces images, à passer en quelques années, de l’état de start-up à celui de leaders mondiaux des marchés de la nouvelle économie,
- l’expression de leur non conformisme dans des champs variés du management : stratégie, marketing, finance, organisation, GRH et communication,
- l’abondance des sources publiques sur les entreprises observées.
- que cette typologie exploratoire est pertinente,
- que ces traits ne sont pas mutuellement exclusifs, mais cumulatifs,
- qu’ils sont représentatifs des organisations dites post-modernes.
Le traitement de la problématique fait appel à la méthode qualitative des études de cas multiples (ou multi-sites), dont les validités interne et externe ont été attestées notamment par les travaux de Yin et de Stake. Ces études de cas s’efforcent de tester des hypothèses complexes, par la triangulation de multiples données recueillies sur des terrains fragmentés et en mouvement. Le terrain choisi est celui du secteur de l’économie internet, qui a émergé au cours des années 1990, et, après avoir traversé une période d’incertitude au début des années 2000, connaît à nouveau un développement rapide. Les entreprises de ce secteur d’activité (appelées start-up, dot.com, e.tailers, e.traders…) ont été fréquemment qualifiées de "non conformistes " (Maitre & Aladjidi, 1999), car elles s’efforcent notamment de fonder une " nouvelle économie " (ou économie virtuelle) en contestant le conformisme de " l’économie traditionnelle " (ou économie réelle).
Les dot.com observées, ont été sélectionnées en fonction des quatre critères suivants :
- leurs images reconnues (par des analystes stratégiques et financiers) d’entreprises non conformistes,
- leurs capacités, malgré ces images, à passer en quelques années, de l’état de start-up à celui de leaders mondiaux des marchés de la nouvelle économie,
- l’expression de leur non conformisme dans des champs variés du management : stratégie, marketing, finance, organisation, GRH et communication,
- l’abondance des sources publiques sur les entreprises observées.
Après une première enquête exploratoire, les cinq dot.com suivantes ont été sélectionnées :
s formes du non conformisme managérial et à la nécessité de respecter le format des communications académiques.
s formes du non conformisme managérial et à la nécessité de respecter le format des communications académiques.
3. Les résultats de la recherche
Les observations des attributs non conformistes des cinq leaders de l’économie internet laissent apparaître des récurrences dans les décisions et les actions de leurs dirigeants, qui, dans l’ensemble, vérifient les principes du non conformisme relevés dans la littérature managériale.
3.1. Cisco, une stratégie d’alliances non conformiste
Cisco Systems Inc est actuellement le leader mondial des réseaux de communication (internet et intranet) entre entreprises (BtoB), dont elle couvre plus des deux tiers du marché. Elle a fondé son core business sur le développement des routeurs, qui contribuent pour 85% à son chiffre d’affaires. Afin de diversifier son core business, sa direction a cherché à maîtriser de nouvelles technologies et à pénétrer de nouveaux segments de marché. Elle s’est ainsi efforcée de transformer Cisco d’équipementier des télécommunications en éditeur de logiciels, sans toutefois rivaliser directement avec Microsoft et Oracle. Mais elle a également cherché à asseoir son développement sur une nouvelle stratégie – jugée non conformiste dans les milieux de la net-économie - de citoyenneté fondée sur la générosité et la confiance, dont " l’alliance e-philanthropique " Cisco - AOL - Yahoo ! constitue un modèle.
Cisco a pris trois types d’initiatives originales (non profit technology initiatives) :
- dans le domaine de l’éducation, Cisco a créé 8400 network academies, qui ont développé l’e-learning dédié à la maintenance des réseaux informatiques ; ces sites ont été visités par plus de 23000 enseignants et 232000 étudiants dans 133 pays ; mais le projet a été suspendu en 2003 ;
- dans le domaine de l’emploi, Cisco a institué un poste de conseiller philanthropique, chargé d’orienter les employés du groupe désireux de consacrer une partie de leur temps aux œuvres caritatives ; en cas d’année sabbatique dédiée à ces dernières, le salarié continue de bénéficier d’un tiers de sa rétribution ; cette initiative n’a toutefois pas rencontré le succès attendu ;
- en 1999, Cisco a fondé netaid avec l’ONU, l’UNICEF, Care …, afin de lutter contre la pauvreté dans le monde ; le site assure toujours des services de promotion publicitaire et de réservation à distance de spectacles donnés en faveur de grandes causes humanitaires.
Au début de l’année 2001, appliquant la philosophie de Cisco selon laquelle " les sociétés internet disposent de vastes ressources encore inexploitées ", les dirigeants de Cisco, d’AOL et de Yahoo !, ont révisé leurs actions philanthropiques afin de dégager de meilleures synergies entre leurs métiers respectifs. Le succès de l’initiative " The Partnership " d’AOL a encouragé Cisco à lancer en novembre 2001 avec AOL et Yahoo !, un vaste projet caritatif. L’alliance déboucha sur la création du site network for good (NFG), conçu comme un portail international de services destinés à la fois aux fondations, aux associations, aux entreprises et aux particuliers, avec pour mission de " susciter toujours plus de dons auprès d’un plus grand nombre de personnes ". Les usagers du site peuvent ainsi bénéficier d’actions d’information, de formation, d’assistance juridique, de demandes et d’offres d’emplois (notamment au sein des associations) de collecte de fonds… Les managers, conscients des risques corporate (sur leurs images d’entreprises citoyennes) et financiers de l’opération, conçurent et lancèrent la plate-forme NFG en appliquant les règles classiques de l’e-marketing, des montages financiers des projets et de la gestion de projet. Bien que le site ait été lancé seulement deux mois après les événements du 11 septembre, les dons recueillis dépassèrent les objectifs.
L’initiative philanthropique, jugée non conformiste, de Cisco a trouvé sa source dans le mouvement d’intense émotion suscité aux Etats-Unis par les attentats du 11 septembre 2001. Sa mise en œuvre a fait appel, au-delà des discours citoyens, à des pratiques et à des techniques classiques de marketing.
3.1. Cisco, une stratégie d’alliances non conformiste
Cisco Systems Inc est actuellement le leader mondial des réseaux de communication (internet et intranet) entre entreprises (BtoB), dont elle couvre plus des deux tiers du marché. Elle a fondé son core business sur le développement des routeurs, qui contribuent pour 85% à son chiffre d’affaires. Afin de diversifier son core business, sa direction a cherché à maîtriser de nouvelles technologies et à pénétrer de nouveaux segments de marché. Elle s’est ainsi efforcée de transformer Cisco d’équipementier des télécommunications en éditeur de logiciels, sans toutefois rivaliser directement avec Microsoft et Oracle. Mais elle a également cherché à asseoir son développement sur une nouvelle stratégie – jugée non conformiste dans les milieux de la net-économie - de citoyenneté fondée sur la générosité et la confiance, dont " l’alliance e-philanthropique " Cisco - AOL - Yahoo ! constitue un modèle.
Cisco a pris trois types d’initiatives originales (non profit technology initiatives) :
- dans le domaine de l’éducation, Cisco a créé 8400 network academies, qui ont développé l’e-learning dédié à la maintenance des réseaux informatiques ; ces sites ont été visités par plus de 23000 enseignants et 232000 étudiants dans 133 pays ; mais le projet a été suspendu en 2003 ;
- dans le domaine de l’emploi, Cisco a institué un poste de conseiller philanthropique, chargé d’orienter les employés du groupe désireux de consacrer une partie de leur temps aux œuvres caritatives ; en cas d’année sabbatique dédiée à ces dernières, le salarié continue de bénéficier d’un tiers de sa rétribution ; cette initiative n’a toutefois pas rencontré le succès attendu ;
- en 1999, Cisco a fondé netaid avec l’ONU, l’UNICEF, Care …, afin de lutter contre la pauvreté dans le monde ; le site assure toujours des services de promotion publicitaire et de réservation à distance de spectacles donnés en faveur de grandes causes humanitaires.
Au début de l’année 2001, appliquant la philosophie de Cisco selon laquelle " les sociétés internet disposent de vastes ressources encore inexploitées ", les dirigeants de Cisco, d’AOL et de Yahoo !, ont révisé leurs actions philanthropiques afin de dégager de meilleures synergies entre leurs métiers respectifs. Le succès de l’initiative " The Partnership " d’AOL a encouragé Cisco à lancer en novembre 2001 avec AOL et Yahoo !, un vaste projet caritatif. L’alliance déboucha sur la création du site network for good (NFG), conçu comme un portail international de services destinés à la fois aux fondations, aux associations, aux entreprises et aux particuliers, avec pour mission de " susciter toujours plus de dons auprès d’un plus grand nombre de personnes ". Les usagers du site peuvent ainsi bénéficier d’actions d’information, de formation, d’assistance juridique, de demandes et d’offres d’emplois (notamment au sein des associations) de collecte de fonds… Les managers, conscients des risques corporate (sur leurs images d’entreprises citoyennes) et financiers de l’opération, conçurent et lancèrent la plate-forme NFG en appliquant les règles classiques de l’e-marketing, des montages financiers des projets et de la gestion de projet. Bien que le site ait été lancé seulement deux mois après les événements du 11 septembre, les dons recueillis dépassèrent les objectifs.
L’initiative philanthropique, jugée non conformiste, de Cisco a trouvé sa source dans le mouvement d’intense émotion suscité aux Etats-Unis par les attentats du 11 septembre 2001. Sa mise en œuvre a fait appel, au-delà des discours citoyens, à des pratiques et à des techniques classiques de marketing.
3.2. Yahoo !, un marketing non conformiste
Le 2 mars 2005, Yahoo ! fêtait son 10e anniversaire en offrant à ses clients les plus fidèles une crème glacée chez Baskin-Robins. Ce geste fut interprété comme une manifestation de " l’esprit Yahoo ! ", à la fois audacieux et facétieux, symbolisé par son surnom (" l’oracle du web "), son acronyme (Yet Another Hierarchical Officious Oracle, assorti d’un point d’exclamation !) et son schéma d’identité visuelle aux couleurs violette et jaune (qui aurait été choisies " car ce sont les teintes de peinture les moins chères des Etats Unis " !). Implanté à Sunnyvale, pépinière de dot.com de la Silicon Valley, Yahoo ! a fait longtemps figure de pionnière à la fois parmi les portails internet et parmi les start-up de la nouvelle économie (Mc Ginn & Nasser, 2004). Le non conformisme de Yahoo ! s’exprima dès 1995, lorsque ses fondateurs furent les premiers à développer un site-portail gratuit en libre service, renonçant à la fois à un modèle d’abonnement classique (du type AOL) et à un partenariat avec le premier site marchand en ligne de l’époque, Internet Shopping Network. L’offre de valeur de Yahoo ! était doublement originale: elle offrait " gratuitement " aux internautes l’accès à des millions de pages web; elle proposait aux entreprises un " savant dosage " entre publicité de masse (broadcasting) et publicité ciblée (narrowcasting).
Lorsque son premier modèle d’affaires, fondé sur la fourniture gratuite de contenus (Internet Service Provider) et sur des annonces publicitaires en ligne, a été concurrencé par ceux d’AOL, de MSN-Microsoft et surtout de Google, puis rapidement dépassé par ce dernier, ses jeunes fondateurs, J.Yang) et D.Filo, firent alors appel à T.Semel, " le manager aux cheveux gris ", ancien du groupe d’audio-visuel Time Warner, qui a aussitôt engagé un vaste processus de refondation des métiers, de repositionnement stratégique, de réingénierie des processus et de réorientation culturelle de l’entreprise. La plupart des observateurs s’interrogèrent alors sur la capacité réelle de Semel, avec son réseau relationnel dans les milieux d’affaires conventionnels, à redresser " une start-up vieillissante de l’e-business ". La nouvelle équipe (la " Y-team ") développa une gamme sans précédent de services one-to-one : personnalisation des pages d’accueil, multiplication des informations thématiques, intégration des services de messagerie, hébergement de pages personnelles, applications de postes de travail sur le web (comme le webtop, avec des services d’emploi du temps en ligne, des services de transfert de fichiers, d’archivage…
En plaçant Semel à la tête de Yahoo !, ses fondateurs réussirent leur pari - jugé alors risqué - de réaliser une synthèse entre la nouvelle économie (" the new world ") et l’économie traditionnelle (" the old work "), en repositionnant la plate forme stratégique et la marque globale Yahoo !, de " pure player " en " click & mortar ".
Confrontés à un environnement complexe et dynamique, soumis aux effets conjugués de l’innovation technologique, de l‘évolution des comportements des internautes, de la pression concurrentielle et de la volatilité du marché boursier, les fondateurs puis les managers de Yahoo!, ont réussi à saisir les " fenêtres d’opportunités " ouvertes sur les niches de l’e-business, et à y conquérir des positions de leader, grâce à une marque globale (dont la forte notoriété est notamment attribuable à sa désinvolture), à des alliances atypiques et à des acquisitions audacieuses de start-up créatives. Le non conformisme de Yahoo ! s’est exprimé sous la forme d’une communication commerciale apparemment décalée – mais en fait adaptée aux socio-styles de son cœur de cible - et de business models souvent pionniers mais créateurs de valeur pour ses clients et pour ses actionnaires.
Le 2 mars 2005, Yahoo ! fêtait son 10e anniversaire en offrant à ses clients les plus fidèles une crème glacée chez Baskin-Robins. Ce geste fut interprété comme une manifestation de " l’esprit Yahoo ! ", à la fois audacieux et facétieux, symbolisé par son surnom (" l’oracle du web "), son acronyme (Yet Another Hierarchical Officious Oracle, assorti d’un point d’exclamation !) et son schéma d’identité visuelle aux couleurs violette et jaune (qui aurait été choisies " car ce sont les teintes de peinture les moins chères des Etats Unis " !). Implanté à Sunnyvale, pépinière de dot.com de la Silicon Valley, Yahoo ! a fait longtemps figure de pionnière à la fois parmi les portails internet et parmi les start-up de la nouvelle économie (Mc Ginn & Nasser, 2004). Le non conformisme de Yahoo ! s’exprima dès 1995, lorsque ses fondateurs furent les premiers à développer un site-portail gratuit en libre service, renonçant à la fois à un modèle d’abonnement classique (du type AOL) et à un partenariat avec le premier site marchand en ligne de l’époque, Internet Shopping Network. L’offre de valeur de Yahoo ! était doublement originale: elle offrait " gratuitement " aux internautes l’accès à des millions de pages web; elle proposait aux entreprises un " savant dosage " entre publicité de masse (broadcasting) et publicité ciblée (narrowcasting).
Lorsque son premier modèle d’affaires, fondé sur la fourniture gratuite de contenus (Internet Service Provider) et sur des annonces publicitaires en ligne, a été concurrencé par ceux d’AOL, de MSN-Microsoft et surtout de Google, puis rapidement dépassé par ce dernier, ses jeunes fondateurs, J.Yang) et D.Filo, firent alors appel à T.Semel, " le manager aux cheveux gris ", ancien du groupe d’audio-visuel Time Warner, qui a aussitôt engagé un vaste processus de refondation des métiers, de repositionnement stratégique, de réingénierie des processus et de réorientation culturelle de l’entreprise. La plupart des observateurs s’interrogèrent alors sur la capacité réelle de Semel, avec son réseau relationnel dans les milieux d’affaires conventionnels, à redresser " une start-up vieillissante de l’e-business ". La nouvelle équipe (la " Y-team ") développa une gamme sans précédent de services one-to-one : personnalisation des pages d’accueil, multiplication des informations thématiques, intégration des services de messagerie, hébergement de pages personnelles, applications de postes de travail sur le web (comme le webtop, avec des services d’emploi du temps en ligne, des services de transfert de fichiers, d’archivage…
En plaçant Semel à la tête de Yahoo !, ses fondateurs réussirent leur pari - jugé alors risqué - de réaliser une synthèse entre la nouvelle économie (" the new world ") et l’économie traditionnelle (" the old work "), en repositionnant la plate forme stratégique et la marque globale Yahoo !, de " pure player " en " click & mortar ".
Confrontés à un environnement complexe et dynamique, soumis aux effets conjugués de l’innovation technologique, de l‘évolution des comportements des internautes, de la pression concurrentielle et de la volatilité du marché boursier, les fondateurs puis les managers de Yahoo!, ont réussi à saisir les " fenêtres d’opportunités " ouvertes sur les niches de l’e-business, et à y conquérir des positions de leader, grâce à une marque globale (dont la forte notoriété est notamment attribuable à sa désinvolture), à des alliances atypiques et à des acquisitions audacieuses de start-up créatives. Le non conformisme de Yahoo ! s’est exprimé sous la forme d’une communication commerciale apparemment décalée – mais en fait adaptée aux socio-styles de son cœur de cible - et de business models souvent pionniers mais créateurs de valeur pour ses clients et pour ses actionnaires.
3.3. Google, un comportement boursier non conformiste
La polémique suscitée par son introduction au Nasdaq, le 24 août 2004, a révélé le caractère à la fois original et paradoxal de la stratégie et de la culture de Google, devenue en seulement quatre années le leader incontesté des moteurs de recherche sur internet. Un expert américain en e-marketing ne déclarait-il pas à la veille de l’introduction ? : " Je pense que le moteur Google est terrifiant. Je l’utilise une centaine de fois par jour ; il répond instantanément et précisément à tout ce que vous cherchez ". Seulement quatre mois après l’opération, les dirigeants de Google annonçaient qu’ils venaient de conclure un accord avec cinq grandes bibliothèques (New York, Harvard, Standford, Michighan, Oxford), afin de numériser 15 millions d’ouvrages (environ 4,5 milliards de pages) et de les rendre accessibles en ligne, intégralement pour les livres dont les droits sont tombés dans le domaine public et sous forme d’extraits pour les autres. Cette initiative a été présentée comme " destinée à réduire la fracture culturelle entre pays pauvres et pays riches ", mais elle a été jugée dans l’ensemble motivée par la volonté d’étendre le système publicitaire du " cost-per-click " au patrimoine de l’humanité.
L’introduction en bourse de l’action Google a été également perçue comme illustrant le modèle non conventionnel de Google : elle a fait l’objet d’une procédure inédite mais risquée sur le marché boursier américain: l'Offre à Prix Minimal (OPM) ou " enchères à la hollandaise ". Contrairement aux autres grandes procédures (Offre à Prix Ouvert, Offre à Prix Ferme), contrôlées par les banques introductrices, la formule de l’OPM est dirigée par l’émetteur. Les fondateurs de Google ont justifié ce choix par des raisons éthiques : la volonté d’appliquer un " processus équitable " pour les investisseurs privés et institutionnels; le souhait d’atteindre un cours stable, reflétant une valorisation équitable de la société pour les actionnaires externes et pour les salariés.
L'opération a été qualifiée de " tempête boursière parfaite " (perfect storm), car elle a été émaillée de nombreux incidents :
- les propos jugés provocateurs des dirigeants de Google, qui présentèrent l’opération comme " démocratique " et le choix du mode d’introduction comme " destiné à éviter le clientélisme des banques " ; par cette " campagne d’identification ", les fondateurs ont cherché à promouvoir l’image " d’entreprise socialement responsable " de Google ;
- le 4 août 2004, les fondateurs révélèrent avoir distribué 30 millions d’actions et d’options d’achat d’actions (stock options) aux salariés de Google, apparemment sans avoir respecté la règle de black out imposée par la SEC pendant l’opération ; cette distribution entraînait des effets de dilution instantanée ou latente du capital ;
- le 13 août, la SEC suspecta les dirigeants de Google d’avoir à nouveau brisé la règle du silence en accordant un entretien aux journalistes de Play Boy ;
- après les enchères, les sociétés de capital-risque fondatrices de Google, Sequoia Capital et Kleiner Perkins Caufield & Byers, contrairement à leur vocation de financer les start-up seulement jusqu’à leur entrée en bourse, ne cédèrent pas leurs actions Google, afin d’encaisser les plus-values latentes.
Le management de Google apparaît donc comme paradoxal en raison de la distance entre l’image socialement responsable projetée par ses dirigeants et les comportements opportunistes observés sur le terrain. Ce mode de management repose sur la mise en scène médiatisée " d’événements magiques " (lancement d’un moteur infaillible, nouvelle procédure " équitable " d’introduction en bourse, numérisation du savoir de l’humanité…), propres à susciter l’émotion et la passion parmi les clients, salariés, actionnaires, partenaires… Mais cette mise en scène recouvre l’application pragmatique de concepts classiques de management (recherche d’avantages concurrentiels soutenables, communication financière orientée vers la création de valeur actionnariale, raids sur concurrents et alliances défensives…).
La polémique suscitée par son introduction au Nasdaq, le 24 août 2004, a révélé le caractère à la fois original et paradoxal de la stratégie et de la culture de Google, devenue en seulement quatre années le leader incontesté des moteurs de recherche sur internet. Un expert américain en e-marketing ne déclarait-il pas à la veille de l’introduction ? : " Je pense que le moteur Google est terrifiant. Je l’utilise une centaine de fois par jour ; il répond instantanément et précisément à tout ce que vous cherchez ". Seulement quatre mois après l’opération, les dirigeants de Google annonçaient qu’ils venaient de conclure un accord avec cinq grandes bibliothèques (New York, Harvard, Standford, Michighan, Oxford), afin de numériser 15 millions d’ouvrages (environ 4,5 milliards de pages) et de les rendre accessibles en ligne, intégralement pour les livres dont les droits sont tombés dans le domaine public et sous forme d’extraits pour les autres. Cette initiative a été présentée comme " destinée à réduire la fracture culturelle entre pays pauvres et pays riches ", mais elle a été jugée dans l’ensemble motivée par la volonté d’étendre le système publicitaire du " cost-per-click " au patrimoine de l’humanité.
L’introduction en bourse de l’action Google a été également perçue comme illustrant le modèle non conventionnel de Google : elle a fait l’objet d’une procédure inédite mais risquée sur le marché boursier américain: l'Offre à Prix Minimal (OPM) ou " enchères à la hollandaise ". Contrairement aux autres grandes procédures (Offre à Prix Ouvert, Offre à Prix Ferme), contrôlées par les banques introductrices, la formule de l’OPM est dirigée par l’émetteur. Les fondateurs de Google ont justifié ce choix par des raisons éthiques : la volonté d’appliquer un " processus équitable " pour les investisseurs privés et institutionnels; le souhait d’atteindre un cours stable, reflétant une valorisation équitable de la société pour les actionnaires externes et pour les salariés.
L'opération a été qualifiée de " tempête boursière parfaite " (perfect storm), car elle a été émaillée de nombreux incidents :
- les propos jugés provocateurs des dirigeants de Google, qui présentèrent l’opération comme " démocratique " et le choix du mode d’introduction comme " destiné à éviter le clientélisme des banques " ; par cette " campagne d’identification ", les fondateurs ont cherché à promouvoir l’image " d’entreprise socialement responsable " de Google ;
- le 4 août 2004, les fondateurs révélèrent avoir distribué 30 millions d’actions et d’options d’achat d’actions (stock options) aux salariés de Google, apparemment sans avoir respecté la règle de black out imposée par la SEC pendant l’opération ; cette distribution entraînait des effets de dilution instantanée ou latente du capital ;
- le 13 août, la SEC suspecta les dirigeants de Google d’avoir à nouveau brisé la règle du silence en accordant un entretien aux journalistes de Play Boy ;
- après les enchères, les sociétés de capital-risque fondatrices de Google, Sequoia Capital et Kleiner Perkins Caufield & Byers, contrairement à leur vocation de financer les start-up seulement jusqu’à leur entrée en bourse, ne cédèrent pas leurs actions Google, afin d’encaisser les plus-values latentes.
Le management de Google apparaît donc comme paradoxal en raison de la distance entre l’image socialement responsable projetée par ses dirigeants et les comportements opportunistes observés sur le terrain. Ce mode de management repose sur la mise en scène médiatisée " d’événements magiques " (lancement d’un moteur infaillible, nouvelle procédure " équitable " d’introduction en bourse, numérisation du savoir de l’humanité…), propres à susciter l’émotion et la passion parmi les clients, salariés, actionnaires, partenaires… Mais cette mise en scène recouvre l’application pragmatique de concepts classiques de management (recherche d’avantages concurrentiels soutenables, communication financière orientée vers la création de valeur actionnariale, raids sur concurrents et alliances défensives…).
3.4. EBay, une organisation non conformiste
Dix années après sa création, eBay inc, leader mondial des enchères en ligne, suscite encore des interrogations parmi ses clients, ses actionnaires et ses partenaires, mais aussi, auprès des analystes financiers et des enseignants-chercheurs en e.management. eBay figure – avec Amazon, Google, Yahoo ! ! et Cisco - parmi les rares start-up de la " nouvelle économie " de la fin du XXe siècle, à poursuivre leur développement mondial au début du XXIe siècle. Malgré sa maîtrise technologique reconnue, sa notoriété commerciale mondiale et sa solidité financière apparente, eBay exploite un modèle (ou des modèles) d’affaires (business models) parfois considérés comme fragiles, car essentiellement fondés sur la confiance entre des acteurs économiques et sociaux de toutes conditions et de toutes cultures, seulement liés par le web. L’histoire non conformiste d’eBay a ainsi pu être qualifiée de " conte de fée " (fairy tale) par des enseignants en stratégie de l’université d‘Harvard (Hawkins & Jacob, 2004).
Le 27 juin 2005, Whitman (directrice générale d’eBay inc), a réuni en convention à San José une partie de la " communauté globale eBay ", constituée de plus de 60 millions de visiteurs réguliers (dits " actifs ") de ses sites et d’utilisateurs " professionnels " de ses services. Plusieurs dizaines de milliers de visiteurs dans le monde complètent chaque année leurs revenus par les recettes de leurs ventes aux enchères, puis, face au succès de leurs produits de niche (notamment, des créations artisanales, des articles de mode, des billets de spectacle…) et grâce à la fidélisation et au développement de leur clientèle, ne se consacrent plus qu’à cette activité, qui devient ainsi leur métier principal. Cette activité parallèle soulève parfois des problèmes juridiques et fiscaux, car certains vendeurs réguliers ne déclarent que tardivement et/ou partiellement les revenus tirés des ventes d’objets mis aux enchères. L’essaimage de la communauté eBay, encouragée par des initiatives comme Prostores (aide à la création de boutiques en ligne) contribue à l’émergence d’un nouveau canal de distribution directe, présentant, contrairement aux canaux traditionnels de l’économie réelle (vente par correspondance, grande distribution, vente classique au détail…) et aux autres canaux de la " nouvelle économie " (e.retail BtoC de type Amazon), une organisation à la fois atomisée (plusieurs millions de vendeurs), dynamique (le nombre d’articles et d’acteurs du marché varient en permanence) et participative (les vendeurs et acheteurs se jugent mutuellement et publiquement dans des forums, cafés et universités en ligne). Cette " organisation globale en réseau " est présentée par les dirigeants d’eBay comme la conjugaison de " la main invisible du marché " symbolisant le marché parfait selon A.Smith, et du " commissaire-priseur " de L.Walras.
Le co-pilotage de la communauté eBay est assuré par le fondateur Omidyar, qui exerce un leadership moral par ses actions de représentation, de communication et de philanthropie au sein de diverses institutions (Tufts University, Santa Fe Institute, Omidyar Foundation …), et par Whitman, qui assure la direction opérationnelle du groupe. Le tandem multiplie les initiatives afin de moraliser les relations entre les membres d’une communauté soumise à divers comportements opportunistes. Ils s’efforcent, par un dialogue entre internautes, de développer la confiance au sein d’un réseau d’acteurs partageant les joies de la navigation sur internet, sensibles aux émotions suscitées par les échanges de conseils et d’expériences avec d’autres internautes de toutes cultures et de toutes appartenances sociales, goûtant au plaisir de la recherche d’objets convoités, plus ou moins utiles, rares et originaux, et sujets aux sensations provoquées par le caractère ludique d’enchères destinées à s’approprier toutes sortes d’objets à des prix (en principe) compétitifs. Mais le capital émotionnel des visiteurs ne doit pas être miné par la perte de confiance occasionnée par des internautes négligents, indélicats ou délinquants. Afin de leur éviter la déception d’objets ne répondant pas à leurs attentes ou le désagrément d’un non-paiement, l’équipe " Règlement et Sécurité " d’eBay a mis en place des systèmes sécurisant les transactions (Billpoint puis PayPal), mais a surtout instauré, grâce à la communauté eBay, une forme d’autodiscipline luttant contre les sites frauduleux. Pour toutes ces raisons, la communauté eBay a pu être qualifiée de " révolutionnaire ".
Le non conformisme d’eBay semble ainsi reposer sur la construction d’un " univers magique " propice à susciter l’émotion et la confiance au sein d’une communauté d’internautes. Le " conte de fées " d’eBay fait donc référence à quatre univers culturels :
Dix années après sa création, eBay inc, leader mondial des enchères en ligne, suscite encore des interrogations parmi ses clients, ses actionnaires et ses partenaires, mais aussi, auprès des analystes financiers et des enseignants-chercheurs en e.management. eBay figure – avec Amazon, Google, Yahoo ! ! et Cisco - parmi les rares start-up de la " nouvelle économie " de la fin du XXe siècle, à poursuivre leur développement mondial au début du XXIe siècle. Malgré sa maîtrise technologique reconnue, sa notoriété commerciale mondiale et sa solidité financière apparente, eBay exploite un modèle (ou des modèles) d’affaires (business models) parfois considérés comme fragiles, car essentiellement fondés sur la confiance entre des acteurs économiques et sociaux de toutes conditions et de toutes cultures, seulement liés par le web. L’histoire non conformiste d’eBay a ainsi pu être qualifiée de " conte de fée " (fairy tale) par des enseignants en stratégie de l’université d‘Harvard (Hawkins & Jacob, 2004).
Le 27 juin 2005, Whitman (directrice générale d’eBay inc), a réuni en convention à San José une partie de la " communauté globale eBay ", constituée de plus de 60 millions de visiteurs réguliers (dits " actifs ") de ses sites et d’utilisateurs " professionnels " de ses services. Plusieurs dizaines de milliers de visiteurs dans le monde complètent chaque année leurs revenus par les recettes de leurs ventes aux enchères, puis, face au succès de leurs produits de niche (notamment, des créations artisanales, des articles de mode, des billets de spectacle…) et grâce à la fidélisation et au développement de leur clientèle, ne se consacrent plus qu’à cette activité, qui devient ainsi leur métier principal. Cette activité parallèle soulève parfois des problèmes juridiques et fiscaux, car certains vendeurs réguliers ne déclarent que tardivement et/ou partiellement les revenus tirés des ventes d’objets mis aux enchères. L’essaimage de la communauté eBay, encouragée par des initiatives comme Prostores (aide à la création de boutiques en ligne) contribue à l’émergence d’un nouveau canal de distribution directe, présentant, contrairement aux canaux traditionnels de l’économie réelle (vente par correspondance, grande distribution, vente classique au détail…) et aux autres canaux de la " nouvelle économie " (e.retail BtoC de type Amazon), une organisation à la fois atomisée (plusieurs millions de vendeurs), dynamique (le nombre d’articles et d’acteurs du marché varient en permanence) et participative (les vendeurs et acheteurs se jugent mutuellement et publiquement dans des forums, cafés et universités en ligne). Cette " organisation globale en réseau " est présentée par les dirigeants d’eBay comme la conjugaison de " la main invisible du marché " symbolisant le marché parfait selon A.Smith, et du " commissaire-priseur " de L.Walras.
Le co-pilotage de la communauté eBay est assuré par le fondateur Omidyar, qui exerce un leadership moral par ses actions de représentation, de communication et de philanthropie au sein de diverses institutions (Tufts University, Santa Fe Institute, Omidyar Foundation …), et par Whitman, qui assure la direction opérationnelle du groupe. Le tandem multiplie les initiatives afin de moraliser les relations entre les membres d’une communauté soumise à divers comportements opportunistes. Ils s’efforcent, par un dialogue entre internautes, de développer la confiance au sein d’un réseau d’acteurs partageant les joies de la navigation sur internet, sensibles aux émotions suscitées par les échanges de conseils et d’expériences avec d’autres internautes de toutes cultures et de toutes appartenances sociales, goûtant au plaisir de la recherche d’objets convoités, plus ou moins utiles, rares et originaux, et sujets aux sensations provoquées par le caractère ludique d’enchères destinées à s’approprier toutes sortes d’objets à des prix (en principe) compétitifs. Mais le capital émotionnel des visiteurs ne doit pas être miné par la perte de confiance occasionnée par des internautes négligents, indélicats ou délinquants. Afin de leur éviter la déception d’objets ne répondant pas à leurs attentes ou le désagrément d’un non-paiement, l’équipe " Règlement et Sécurité " d’eBay a mis en place des systèmes sécurisant les transactions (Billpoint puis PayPal), mais a surtout instauré, grâce à la communauté eBay, une forme d’autodiscipline luttant contre les sites frauduleux. Pour toutes ces raisons, la communauté eBay a pu être qualifiée de " révolutionnaire ".
Le non conformisme d’eBay semble ainsi reposer sur la construction d’un " univers magique " propice à susciter l’émotion et la confiance au sein d’une communauté d’internautes. Le " conte de fées " d’eBay fait donc référence à quatre univers culturels :
[TABLE, largeur:500, ecart:5, bordure:#3300CC] Environnement magique; Monde simple (" enfantin "); Univers de sensations et d’émotions; Histoire morale Accès à des millions d’objets originaux, " Main invisible " du marché, Croissance exponentielle des ventes; Transactions (réalisées de son domicile) rapides, sans risques et facilitées par de nombreux logiciels; Recherche et conquête d’objets originaux - Dialogue avec une communauté multiculturelle; Communauté dotée d’une charte éthique, d’une autodiscipline et de systèmes de paiement sécurisés
Le concept de " révolution " recouvre plusieurs notions : une opposition à l’ordre établi et la recherche d’un nouvel ordre (politique, économique et/ou social). Le modèle eBay – et notamment sa communauté " révolutionnaire " de visiteurs réguliers – répond à ces deux critères : elle se présente comme étant un nouveau canal de vente qui se substitue aux canaux de l’économie traditionnelle et même de la nouvelle économie (e.tailing), en offrant un choix plus large et des coûts moindres de transaction ; elle instaure un dialogue direct entre vendeurs et acheteurs et gère, suivant une forme de " démocratie directe ", les comportements parfois opportunistes de certains de ses membres. La " révolution eBay " n’est cependant qu’apparente, car les enchères en ligne restent un canal marginal de vente ; elles ne portent que sur certains types de produits (sans SAV) ; les prix pratiqués ne sont pas toujours compétitifs, car les vendeurs ne sont pas réunis en groupements ou centrales d’achat (comme les grands e.tailers), les comportements indélicats ou délictueux demeurent toujours nombreux et sans cesse nouveaux.
3.5. Amazon, une gestion des ressources humaines et une culture non conformistes
Amazon.com (AC), créée en 1994, a construit un modèle d’affaires reposant sur la vente en ligne de livres grand public. Jeff P. Bezos et son équipe se comportèrent initialement en pure player, exerçant le métier d’e-bookseller - avec pour slogan " Get Big Fast " - avec pour avantages concurrentiels des prix compétitifs, un vaste choix et surtout, une gestion de la relation clients créative. A partir de 1997, la direction a réorienté sa stratégie en accélérant sa course aux volumes (son slogan devenant " Get Bigger Faster ") et en diversifiant ses activités (par une stratégie dite des " keiretsus " japonais). Le site Amazon est ainsi devenu un " portail horizontal où chacun peut acheter n’importe quoi, n’importe où et n’importe quand " (Bezos, 2000). Selon lui, " la culture d’entreprise, c’est un tiers de rêve, un tiers de réalité et un tiers de hasard ". Elle repose sur un langage, des valeurs et un style de leadership non conformistes. La culture du groupe Amazon est d’abord véhiculée par un langage (l’amazon speak) emprunté à la fois à l’univers d’internet (virtual commerce, frictionless competition, digital business...), au marketing neuronal (customer centric attitude, 1-click shopping, on-line model...) et à son fondateur (Earth Biggest Online Store, Get Big Fast, Get Bigger Faster, the Amazon effect ...).
L’histoire d’AC est présentée comme étant la " synthèse d’une vision, d’une intelligence et d’une maîtrise des technologies internet, des marchés des capitaux et de la gestion du temps " (Applegate, Collura, 2000). La culture d’AC repose apparemment sur une " vision " résumée par la formule de Bezos : " Nous faisons l’histoire. C’est la meilleure raison de travailler chez Amazon. Nous n’aspirons pas à devenir une grande compagnie; nous créons un nouveau modèle ". Ce dernier repose apparemment sur quatre modèles originaux : celui de l’e-commerce, celui (typiquement américain) de la conquête pionnière ; un " modèle marketing " (the revolutionary model that changed the world), fondé sur la personnalisation (customization ou customer-centric) de la relation avec le client, un " modèle social " (the next generation), selon lequel la société AC étant la propriété des salariés (grâce aux distributions d’actions), ces derniers ne doivent pas compter leurs efforts au service de " leur " entreprise, notamment lors des " days 1 ", durant lesquels " nul ne peut ni s’arrêter ni se reposer ".
Mais, vérifiant les observations de Brunsson, certains observateurs (Fondeur, 2001) ont émis des réserves sur le sens éthique de certains managers d’AC en dressant notamment un parallèle entre les méthodes commerciales et les pratiques de GRH d’AC. AC conclut des accords avec des moteurs de recherche afin d’attirer l’internaute sur le site d’Amazon ; " bien sur, il est fréquent qu’aucune référence ne corresponde à la recherche, mais l’essentiel est de l’attirer sur le site, quitte à lui mentir un peu …, chaque visiteur a la possibilité de laisser ses impressions sur les ouvrages qu’il a lus ; ceci permet de donner à peu de frais du contenu au site (sans rémunérer les rédacteurs) et de fidéliser les internautes en leur donnant l’impression qu’ils appartiennent à une même communauté "… En matière de GRH, " le modèle social d’AC, fondé sur le culte du père fondateur et sur l’illusion donnée aux salariés qu’ils partagent grâce aux stock-options les intérêts de la direction, semble fondé sur les mêmes principes que le modèle commercial d’AC "
Amazon.com (AC), créée en 1994, a construit un modèle d’affaires reposant sur la vente en ligne de livres grand public. Jeff P. Bezos et son équipe se comportèrent initialement en pure player, exerçant le métier d’e-bookseller - avec pour slogan " Get Big Fast " - avec pour avantages concurrentiels des prix compétitifs, un vaste choix et surtout, une gestion de la relation clients créative. A partir de 1997, la direction a réorienté sa stratégie en accélérant sa course aux volumes (son slogan devenant " Get Bigger Faster ") et en diversifiant ses activités (par une stratégie dite des " keiretsus " japonais). Le site Amazon est ainsi devenu un " portail horizontal où chacun peut acheter n’importe quoi, n’importe où et n’importe quand " (Bezos, 2000). Selon lui, " la culture d’entreprise, c’est un tiers de rêve, un tiers de réalité et un tiers de hasard ". Elle repose sur un langage, des valeurs et un style de leadership non conformistes. La culture du groupe Amazon est d’abord véhiculée par un langage (l’amazon speak) emprunté à la fois à l’univers d’internet (virtual commerce, frictionless competition, digital business...), au marketing neuronal (customer centric attitude, 1-click shopping, on-line model...) et à son fondateur (Earth Biggest Online Store, Get Big Fast, Get Bigger Faster, the Amazon effect ...).
L’histoire d’AC est présentée comme étant la " synthèse d’une vision, d’une intelligence et d’une maîtrise des technologies internet, des marchés des capitaux et de la gestion du temps " (Applegate, Collura, 2000). La culture d’AC repose apparemment sur une " vision " résumée par la formule de Bezos : " Nous faisons l’histoire. C’est la meilleure raison de travailler chez Amazon. Nous n’aspirons pas à devenir une grande compagnie; nous créons un nouveau modèle ". Ce dernier repose apparemment sur quatre modèles originaux : celui de l’e-commerce, celui (typiquement américain) de la conquête pionnière ; un " modèle marketing " (the revolutionary model that changed the world), fondé sur la personnalisation (customization ou customer-centric) de la relation avec le client, un " modèle social " (the next generation), selon lequel la société AC étant la propriété des salariés (grâce aux distributions d’actions), ces derniers ne doivent pas compter leurs efforts au service de " leur " entreprise, notamment lors des " days 1 ", durant lesquels " nul ne peut ni s’arrêter ni se reposer ".
Mais, vérifiant les observations de Brunsson, certains observateurs (Fondeur, 2001) ont émis des réserves sur le sens éthique de certains managers d’AC en dressant notamment un parallèle entre les méthodes commerciales et les pratiques de GRH d’AC. AC conclut des accords avec des moteurs de recherche afin d’attirer l’internaute sur le site d’Amazon ; " bien sur, il est fréquent qu’aucune référence ne corresponde à la recherche, mais l’essentiel est de l’attirer sur le site, quitte à lui mentir un peu …, chaque visiteur a la possibilité de laisser ses impressions sur les ouvrages qu’il a lus ; ceci permet de donner à peu de frais du contenu au site (sans rémunérer les rédacteurs) et de fidéliser les internautes en leur donnant l’impression qu’ils appartiennent à une même communauté "… En matière de GRH, " le modèle social d’AC, fondé sur le culte du père fondateur et sur l’illusion donnée aux salariés qu’ils partagent grâce aux stock-options les intérêts de la direction, semble fondé sur les mêmes principes que le modèle commercial d’AC "
Conclusion : les attributs post-modernes du modèle de l’entreprise non conformiste
Les observations précédentes permettent de conclure que la définition liminaire du non conformisme appliquée à Einstein – fondée sur un cartésianisme libéré des contraintes socio-cognitives – ne saurait traduire la complexité du concept d’entreprise non conformiste. La recherche montre en effet que, dans les cinq cas étudiés, et malgré la diversité des stratégies et des organisations observées, le non conformisme revêt, à des degrés divers, les quatre principales formes mises à jour dans la revue de littérature : les fondateurs des entreprises ont contesté, du moins dans la phase d’émergence de leurs entreprises, " l’ordre établi " par les acteurs dominants de leurs marchés et/ou de leurs milieux professionnels; leurs discours ont suscité des réactions hostiles ou réservées de la part de ces derniers; certains de leurs projets et de leurs comportements ont pu apparaître comme irrationnels, mais ils n’en ont pas moins (parfois cyniquement) touché l’intelligence émotionnelle de leurs clients, salariés et/ou partenaires. Dans les différents cas observés, les décisions et/ou les actions jugées non conformistes des dirigeants ont indirectement contribué à renforcer les avantages concurrentiels de leurs entreprises et à créer de la valeur pour leurs actionnaires.
Malgré l’étroitesse de l’échantillon observé, le constat précédent contribue à une meilleure intelligibilité de l’entreprise non conformiste. Il montre que, dans les cas étudiés, les manifestations non conformistes participent d’un " esprit ", qui rejette l’ordre social traditionnel fondé sur une économie réelle, tout en s’efforçant d’instaurer un nouveau modèle global ancré dans l’économie virtuelle. Cet esprit des fondateurs vise à motiver les salariés des organisations et à capter ou fidéliser leurs clients et partenaires. Bien qu’affichant des discours souvent moralisateurs (appelant à une société plus responsable et équitable), les comportements des leaders des entreprises non conformistes ne sont pas exempts d’hypocrisie (au sens de Brunsson, 1989), car ils laissent apparaître des écarts entre leurs discours et leurs actions. Les études de cas montrent également que cet " esprit ", malgré la diversité de ses " mises en scène " (au sens de Weick, 1979), est dans l’ensemble partagé par les cinq dot.com de l’échantillon de population observé. L’esprit non conformiste n’échappe donc pas aux effets d’isomorphisme institutionnel ou de contagion mimétique propres aux milieux conformistes. Le style non conformiste affiché dans la plupart des milieux créatifs (recherche expérimentale, création publicitaire ou artistique…) ne témoigne t-il pas paradoxalement d’un certain conformisme ?
L’entreprise non conformiste présente donc un caractère auto-référentiel (ou " auto-transcendant ", selon Dupuy, (1992) : les comportements individuels originaux (eigen behaviors) des leaders-fondateurs puis des managers des entreprises non conformistes, contribuent à reconstruire leurs environnements; ils ne sont jugés " indéterminés " que dans la mesure où ils ne se plient pas (du moins en apparence) aux codes de leurs milieux, mais ils restent en fait " co-déterminés " par les discours et les actions de leurs partenaires, concurrents, clients, fournisseurs et/ou actionnaires, en vertu du " paradoxe des deux autonomies " mis à jour par les travaux d’Hayek. " Le tout et les éléments se déterminant mutuellement " (Rojot, 2005), cette co-détermination entraîne l’émergence collective de nouveaux ordres sociaux spontanés, parfois encore diffus (dans les cas étudiés, celui des communautés virtuelles et d’un modèle social issu d’internet). Le non conformisme managérial se présente également comme un " texte " au sens de Derrida, recouvrant des discours et des comportements organisationnels parfois contradictoires. Ce texte constitue une nouvelle source de pouvoir, puisqu’il permet, selon l’expression de Foucault, de " voir sans être vu ". En ce sens, comme le constate Dupuy (1992), le non conformisme demeure " une émancipation considérable, car il permet de ne pas se soucier en permanence de la cohésion sociale, ni de manifester de tout son vouloir et de toute sa conscience sa subordination à l’ordre collectif ". Il se présente donc comme une nouvelle forme " d’individualisme méthodologique complexe ", encore difficilement déchiffrable par les modèles académiques actuels des sciences de gestion, mais probablement maîtrisée par ceux de demain.
Malgré l’étroitesse de l’échantillon observé, le constat précédent contribue à une meilleure intelligibilité de l’entreprise non conformiste. Il montre que, dans les cas étudiés, les manifestations non conformistes participent d’un " esprit ", qui rejette l’ordre social traditionnel fondé sur une économie réelle, tout en s’efforçant d’instaurer un nouveau modèle global ancré dans l’économie virtuelle. Cet esprit des fondateurs vise à motiver les salariés des organisations et à capter ou fidéliser leurs clients et partenaires. Bien qu’affichant des discours souvent moralisateurs (appelant à une société plus responsable et équitable), les comportements des leaders des entreprises non conformistes ne sont pas exempts d’hypocrisie (au sens de Brunsson, 1989), car ils laissent apparaître des écarts entre leurs discours et leurs actions. Les études de cas montrent également que cet " esprit ", malgré la diversité de ses " mises en scène " (au sens de Weick, 1979), est dans l’ensemble partagé par les cinq dot.com de l’échantillon de population observé. L’esprit non conformiste n’échappe donc pas aux effets d’isomorphisme institutionnel ou de contagion mimétique propres aux milieux conformistes. Le style non conformiste affiché dans la plupart des milieux créatifs (recherche expérimentale, création publicitaire ou artistique…) ne témoigne t-il pas paradoxalement d’un certain conformisme ?
L’entreprise non conformiste présente donc un caractère auto-référentiel (ou " auto-transcendant ", selon Dupuy, (1992) : les comportements individuels originaux (eigen behaviors) des leaders-fondateurs puis des managers des entreprises non conformistes, contribuent à reconstruire leurs environnements; ils ne sont jugés " indéterminés " que dans la mesure où ils ne se plient pas (du moins en apparence) aux codes de leurs milieux, mais ils restent en fait " co-déterminés " par les discours et les actions de leurs partenaires, concurrents, clients, fournisseurs et/ou actionnaires, en vertu du " paradoxe des deux autonomies " mis à jour par les travaux d’Hayek. " Le tout et les éléments se déterminant mutuellement " (Rojot, 2005), cette co-détermination entraîne l’émergence collective de nouveaux ordres sociaux spontanés, parfois encore diffus (dans les cas étudiés, celui des communautés virtuelles et d’un modèle social issu d’internet). Le non conformisme managérial se présente également comme un " texte " au sens de Derrida, recouvrant des discours et des comportements organisationnels parfois contradictoires. Ce texte constitue une nouvelle source de pouvoir, puisqu’il permet, selon l’expression de Foucault, de " voir sans être vu ". En ce sens, comme le constate Dupuy (1992), le non conformisme demeure " une émancipation considérable, car il permet de ne pas se soucier en permanence de la cohésion sociale, ni de manifester de tout son vouloir et de toute sa conscience sa subordination à l’ordre collectif ". Il se présente donc comme une nouvelle forme " d’individualisme méthodologique complexe ", encore difficilement déchiffrable par les modèles académiques actuels des sciences de gestion, mais probablement maîtrisée par ceux de demain.
Tableau 4 . comparaison des approches non conformistes des leaders de la net.économie
[TABLE, largeur:500, ecart:5, bordure:#3300CC] ; Cisco; Yahoo !; Google; E-Bay; Amazon Champ analysé / Critère observé; Stratégie; Marketing; Finance; Organisation en réseau; Modèle social et culturel "Groupe contestataire, rejet des"; Modèles conventionnels d’alliances; Images de marque classiques; Procédures standard d’introduction en bourse; Réseaux traditionnels de détaillants; Modèles courants de GRH "Acteur désocialisé" opposition des; Acteurs de l’économie réelle et des fondations classiques; Milieux publicitaires traditionnels; Milieux boursiers et bancaires; Milieux des détaillants (économies réelle et nouvelle); Salariés et partenaires sociaux "Organisation paradoxale" principalement en raison; De techniques jugées trop markéthiques; De décisions et de comportements paradoxaux; De discours et d’actions contradictoires; D’une organisation et de pratiques ambigües; De discours jugés manipulatoires "Communauté émotionnelle" fondée sur; Une nouvelle forme de philanthropie; De nouvelles relations entre les internautes; Une nouvelle responsabilité sociétale; Un nouveau type de transactions marchandes; Une nouvelle société de l’internet
Bibliographie
Applegate L.M., Collura M., " Amazon.com : Exploiting the Value of Digital Business ", cas Harvard Business School n° 9-800-330, 2000.
Bezos J., " Déclaration au Symposium de la Harvard Business School ", 26 feb.2000.
Bourdieu P, La distinction du goût, éd. De Minuit, 1979.
Brunsson N, the Organization of Hypocrisy, John Wiley & son, 1989.
Brynjolfsson E., " Frictionless Commerce ", Management Science, mars 2000.
Burgelman R.A.& Meza PH., " Amazon.com : Evolution of the e–tailer ", business school of Stanford case, SM – 83, mars 2001.
Cialdini R, Influence, science and practice, Harper Collins, 1993.
DiMaggio P & Powell W, " the Iron Cage revisited ", American Sociological Review, vol 48, 1983.
Dupuy J-P, introduction aux sciences sociales : logique des phénomènes collectifs, Ellipses, 1992.
Durkheim, formes élémentaires de la vie religieuse, Alcan, 1912.
Festinger L, a Theory of cognitive Dissonance, Standford university press, 1957.
Fondeur Y., " Amazon.com aurait-il un modèle social aussi fragile que son modèle économique ? ", Chronique internationale de l’IRES, n° 69, mars 2001.
Freeman J, organizational Ecology, Harvard university press, 1989.
Goffman E, The presentation of Self in everyday, Doubleday, 1959.
Goshal S & Barlett C, l’entreprise individualisée, Maxima, 1998.
Granovetter M, " economic Action and social Structure: the Problem of Embeddedness ", American Journal of sociology, vol 91, n°3, nov 1985.
Hawkins DF & Jacob C, " eBay inc: Internet success or fairy Tale ? ", HBS case -104-049, april 7, 2004.
Hedberg B & alii, Virtual Organizations and Beyond : discover Imaginary Systems, Wiley, 1997.
Miles RE & Snow CC, " Organizations : new Concepts for new Forms ", California Management Review, n°3, 1989.
Mc Ginn K & Nasser N, " Yahoo ! becoming a Competitor in the Career Listings Space ", HBS cases A & B, november 2004.
Maître B & Aladjidi G, les business models de la nouvelle économie, Dunod, 1999.
March J, " Exploration and Exploitation in organizational Learning ", in Cohen & Sproult, 1996.
Martinet AC, " une refondation de la pensée stratégique ", Revue Française de Gestion, vol 28, n°139, juillet-août 2002.
Meyer JW & Rowan B, the Structure of educational Organizations, in Meyer &alii, Environment and Organizations, jossey bass inc, 1978.
Prahalad C & Bettis R, " the dominant Logic: a new Linkage between Diversity and Performance ", Strategic management journal, vol 7, 1986.
Spector R. , Amazon.com. Get Big Fast, Random House, 2000, 2ème édition.
Rojot J, Théorie des organisations, Eska, 2005.
Watzlawick P, l’invention de la réalité – contribution au constructivisme, ed du Seuil, 1988.
Weick K, the Social Psychology of Organizing, Random House, 1979.
Bezos J., " Déclaration au Symposium de la Harvard Business School ", 26 feb.2000.
Bourdieu P, La distinction du goût, éd. De Minuit, 1979.
Brunsson N, the Organization of Hypocrisy, John Wiley & son, 1989.
Brynjolfsson E., " Frictionless Commerce ", Management Science, mars 2000.
Burgelman R.A.& Meza PH., " Amazon.com : Evolution of the e–tailer ", business school of Stanford case, SM – 83, mars 2001.
Cialdini R, Influence, science and practice, Harper Collins, 1993.
DiMaggio P & Powell W, " the Iron Cage revisited ", American Sociological Review, vol 48, 1983.
Dupuy J-P, introduction aux sciences sociales : logique des phénomènes collectifs, Ellipses, 1992.
Durkheim, formes élémentaires de la vie religieuse, Alcan, 1912.
Festinger L, a Theory of cognitive Dissonance, Standford university press, 1957.
Fondeur Y., " Amazon.com aurait-il un modèle social aussi fragile que son modèle économique ? ", Chronique internationale de l’IRES, n° 69, mars 2001.
Freeman J, organizational Ecology, Harvard university press, 1989.
Goffman E, The presentation of Self in everyday, Doubleday, 1959.
Goshal S & Barlett C, l’entreprise individualisée, Maxima, 1998.
Granovetter M, " economic Action and social Structure: the Problem of Embeddedness ", American Journal of sociology, vol 91, n°3, nov 1985.
Hawkins DF & Jacob C, " eBay inc: Internet success or fairy Tale ? ", HBS case -104-049, april 7, 2004.
Hedberg B & alii, Virtual Organizations and Beyond : discover Imaginary Systems, Wiley, 1997.
Miles RE & Snow CC, " Organizations : new Concepts for new Forms ", California Management Review, n°3, 1989.
Mc Ginn K & Nasser N, " Yahoo ! becoming a Competitor in the Career Listings Space ", HBS cases A & B, november 2004.
Maître B & Aladjidi G, les business models de la nouvelle économie, Dunod, 1999.
March J, " Exploration and Exploitation in organizational Learning ", in Cohen & Sproult, 1996.
Martinet AC, " une refondation de la pensée stratégique ", Revue Française de Gestion, vol 28, n°139, juillet-août 2002.
Meyer JW & Rowan B, the Structure of educational Organizations, in Meyer &alii, Environment and Organizations, jossey bass inc, 1978.
Prahalad C & Bettis R, " the dominant Logic: a new Linkage between Diversity and Performance ", Strategic management journal, vol 7, 1986.
Spector R. , Amazon.com. Get Big Fast, Random House, 2000, 2ème édition.
Rojot J, Théorie des organisations, Eska, 2005.
Watzlawick P, l’invention de la réalité – contribution au constructivisme, ed du Seuil, 1988.
Weick K, the Social Psychology of Organizing, Random House, 1979.
Présentation de l'auteur
Après avoir assumé des responsabilités de direction dans différents groupes industriels, Jean Jacques Pluchart, Docteur en Sciences de Gestion est retourné vers l'enseignement et la recherche. Il est actuellement professeur en management stratégique à l'Université Paris 1 et Paris 2 après avoir été enseignant chercheur à l'ESC Clermont. Il a écrit un nombre important d'articles académiques et de livres en management. Pour découvrir ses publications, cliquez ici
Il a notamment publié en 2009 un manuel de management stratégique qui fait référence dans le monde universitaire : Master Stratégie (Stratégie, organisation, culture et gouvernance des entreprises), éditions Eska, 470 p.
Il a notamment publié en 2009 un manuel de management stratégique qui fait référence dans le monde universitaire : Master Stratégie (Stratégie, organisation, culture et gouvernance des entreprises), éditions Eska, 470 p.