Le Temps des Valeurs

Encadré 2 : Partager la richesse chez SEMCO


L’intéressement seul ne crée pas l’implication du personnel
[…] L’intéressement aux résultats fonctionne habituellement très mal […] La vérité, c’est que l’intéressement ne crée pas l’implication du personnel, elle l’exige. Le système ne marche que lorsqu’il vient couronner une politique cohérente de management participatif [« a broad and comprehensive programme of participation »]. Chez Semco, cela ne nous intéresse pas de demander à quelques responsables de décider quel montant attribuer à qui. Nous voulons que ce soient les bénéficiaires qui en prennent la décision. D’accord, mais quels bénéficiaires ? A l’époque, nous avions huit divisions autonomes réparties en quatre usines, produisant des douzaines de produits destinés à trois secteurs économiques différents. Les délais de livraison varient de vingt-quatre heures pour une balance digitale à deux ans pour une biscuiterie clés en main […] Ce paiement supplémentaire sera-t-il basé sur l’ensemble des bénéfices de la compagnie, sur celui de chaque usine, de chaque division indépendante ou même, pourquoi pas, sur le bénéfice attribuable à chaque cellule de production à l’intérieur d’une division donnée [au risque de creuser des différences entre les salariés] ?

Les salariés décident d’une répartition égalitaire des bénéfices
[...] Comme à l’habitude, nous allons ne tenir compte ni de grands principes ni d’antécédents, nous partirons de la réalité. Nous allons organiser des réunions dans les ateliers, avec les comités d’usine et avec les responsables syndicaux au cours des dix-huit mois qui vont suivre. […] Nous négocions donc. En commençant par le bénéfice total de Semco, c’est-à-dire les recettes moins les dépenses. Nous tombons ensuite d’accord sur la nécessité d’en déduire 40 % pour les impôts, 25 % pour les dividendes à verser aux actionnaires, et 12 % à réinvestir sous forme d’autofinancement : c’est le minimum si l’on veut que l’entreprise continue à prospérer. Cela nous laisse 23 % […] Finalement les salariés décident que le plan de partage des résultats Semco (dit SemcoPar) fonctionnera de la manière suivante : tous les trimestres, on calcule le bénéfice de chaque division autonome et 23 % de cette somme est versée à son personnel […] Ce que devient cet argent, c’est aux salariés de le déterminer. Ils peuvent le répartir par tête, ou bien tenir compte de l’ancienneté, du salaire, ou d’autres critères. Ou encore l’utiliser autrement, comme par exemple consentir des prêts pour l’achat d’une maison, plutôt que de le distribuer. Quoi qu’ils décident, cela ne s’applique qu’au trimestre en question. Trois mois plus tard, on repart à zéro. Du moins en théorie. En réalité, toutes les divisions ont toujours pratiqué une répartition régulière, en donnant la même somme à tout le monde. »

(Semler, 1993, éd. franç. pp. 151-157)

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