L’ouvrage mérite une attention particulière en raison de l’originalité et de la profondeur de son analyse du concept de marché. Tandis que la plupart des autres publications observent les dérives de toute nature des marchés, Laurence Fontaine s’interroge sur la nature du marché, qu’elle qualifie de " conquête sociale ", d’" institution d’échange ", de " moyen d’émancipation " des acteurs sociaux, notamment des femmes et des plus démunis. Par de savants parallèles entre les marchés du passé et du présent, elle montre comment le capitalisme de marché s’est progressivement libéré de l’ordre féodal, patriarcal et religieux. Elle décrit comment se sont développés les places et les réseaux du commerce local puis international. Elle montre que le bon fonctionnement d’un marché implique une égalité de statut et de traitement de ses différents acteurs, ainsi que des institutions chargées d’en régler les conflits. Elle explique comment l’économie solidaire d'aujourd'hui s’inspire des marchés de rue ouverts aux plus pauvres. Elle souligne la vulnérabilité des marchés, notamment monétaires et financiers, et dénie au travail le statut de marchandise échangeable sur un marché. Elle compare les mécanismes des crises récentes à ceux de la « bulle » des tulipes hollandaises au XVIIe siècle.
Laurence Fontaine propose enfin un " ancrage du marché dans les droits de l’homme ", lui attribuant le statut d’" espace public solidaire ". La diversité des voies ouvertes par l’auteure invite à placer son livre à côté de ceux d’Adam Smith dans la grande bibliothèque de l’économie politique.
Source : Cercle Turgot