Histoires et Metaphores

Le Paon se plaignant à Junon


Le paon se plaignait à Junon.
" Déesse, disait-il, ce n'est pas sans raison 
Que je me plains, que je murmure :
Le chant dont vous m'avez fait don
Déplaît à toute la nature ;
Au lieu qu'un rossignol, chétive créature,
Forme des sons aussi doux qu'éclatants,
Est lui seul l'honneur du printemps. "
Junon répondit en colère :
" Oiseau jaloux, et qui devrais te taire,
Est-ce à toi d'envier la voix du rossignol,
Toi que l'on voit porter à l'entour de ton col
Un arc-en-ciel nué de cent sortes de soies ; 
Qui te panades, qui déploies
Une si riche queue, et qui semble à nos yeux
La boutique d'un lapidaire ?
Est-il quelque oiseau sous les cieux
Plus que toi capable de plaire ?
Tout animal n'a pas toutes propriétés.
Nous vous avons donné diverses qualités :
Les uns ont la grandeur et la force en partage ;
Le faucon est léger, l'aigle plein de courage ;
Le corbeau sert pour le présage ;
La corneille avertit des malheurs à venir ;
Tous sont contents de leur ramage.
Cesse donc de te plaindre ; ou bien, pour te punir,
Je t'ôterai ton plumage. "
 
Jean de La Fontaine - Dix-septième fable du livre  II   
 

La source de ce poème est ą chercher chez Phèdre (Livre III, 16, " Plainte du Paon à Junon "). Nous avons déjà rencontré une fable semblable. En effet, dans " Le Corbeau voulant imiter l’Aigle " (Livre II, fable 16), nous voyons le corvidé y étaler la jalousie qu’il ressent pour la force de l’oiseau de Jupiter. Dans cette fable-récit, le paon est lui aussi jaloux mais de la voix du rossignol.
 

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