4.3. L’analyse documentaire de première ou de deuxième main
C’est un fait largement établi, même parmi les plus anti-intellectualistes d’entre eux (Zobrist par exemple) : à côté de leur oralité effervescente, les entrepreneurs d’utopie écrivent beaucoup, et pas seulement sur leur expérience d’entreprise mais dans le domaine de la philosophie sociale et politique. C’est là d’ailleurs leur marque de fabrique. Déjà, R. Owen fut un plumitif respectable. E. Cabet et J.-B. Godin excipèrent d’une bibliographie copieuse. Plus près de nous, A. Olivetti marqua la vie intellectuelle, politiquejavascript:void(0) et sociale de son temps, beaucoup plus qu’il n’influença les milieux patronaux, toujours réticents face à son exigence de démocratie dans tous les registres de la société. On lui doit ainsi de nombreux ouvrages, la création d’une revue et d’une maison d’édition, adonnés à l’industrie certes, mais aussi à l’architecture, l’urbanisme ou l’esthétique, et reliés entre eux par le fil conducteur de la notion de comunità (Olivetti, 1946, 1960). Il en serait de même des pères fondateurs du complexe coopératif de Mondragòn et pas seulement du très pascalien José Maria Arizmendiarrieta (1999), l’initiateur, et les quinze volumes de ses œuvres complètes, mais également de ses descendances intellectuelles prolifiques (par ex. Azurmendi, 1992 ; Ormaetxea, 1997). Nous l’avons vu, la récolte sur les entreprises libérées actuelles ne serait pas moins abondante. Mais à l’exception sans doute de M. Hervé dont les ambitions théoriques tranchent sur le périmètre plus modestement managérial de ses contemporains (Hervé et alii, 2007 ; Hervé & Brière, 2012), il faut bien souvent se contenter de témoignages de seconde main ou de formalisations disséminées dans des colloques, thèses ou revues de dialogue entre chercheurs et praticiens (Futuribles, Harvard Business Review, Sloan Management Review …).
Sur ce point, les archives historiographiques vouées aux expériences les plus lointaines seraient paradoxalement plus plantureuses et plus précises, avec leurs relevés méticuleux en eaux profondes. L’expérience de l’Icarie d’E. Cabet en fournit le prototype, avec les innombrables écrits d’E. Cabet lui-même, ses témoins exaltés et ses contre-témoins désenchantés, ses observateurs de première main et ceux de deuxième main (Crétinon & Lacour, 1855, rééd. Par Rude 1952 ; Francis et Gonthier, 1983), sans oublier les forages intensifs de son historien attitré, Jules Prudhommeaux, (1907) et les fouilles successives dont elle fit l’objet pour servir à l’épopée du socialisme et du communisme (notamment chez Ch. Gide). Tout semble en effet présent dans ce vertigineux gisement documentaire : depuis les protocoles les plus détaillés des prises de décision et des débats en réunion, jusqu’à l’organisation et les disciplines du travail, en passant par les politiques de rémunération égalitaire, les controverses qu’elles suscitent en même temps que les contestations sur le leadership de Cabet. Il en irait de même pour l’expérience de R. Owen à New Lanark (Écosse), puis à New Harmony (Indiana) et sa fondation d’une bourse du travail à Londres. Plus récemment, dans son approche sociohistorique du Familistère de Guise, M. Lallement a confirmé de brillante façon la fécondité de cette démarche documentaire. Moyennant l’évitement de « quelques pièges » il argumente, lui aussi, sur la validité sociologique du « prisme biographique », « tant il est vrai que l’expérience individuelle [celle de Godin en l’espèce] est un fil d’Ariane qui mène rapidement vers des pratiques et des représentations collectivement partagées » (2009 : 22). Encore faut-il analyser « la parole et l’action de Godin en contexte » et savoir démêler « ce qui revient en propre au fondateur » [de l’expérimentation de Guise] (ibid. : 23-24). D’où la plongée dans des cartons d’archives et la fréquentation des historiens. Mais là encore, le matériau dont on dispose n’est pas neutre : « ce sont avant tout les conceptions de Godin et de ses proches qui sont mises en mots, rationalisées, objectivées, offertes à l’interprétation, rappelle Lallement. A défaut de supports […] aussi nombreux que ceux dont a pu bénéficier l’industriel picard, le monde et les avis des familles ouvrières sont plus difficiles à connaître et à décrypter. Ce biais méthodologique est difficilement contournable. J’ai tenté d’en limiter les effets en mobilisant, quand cela était possible, des sources extérieures au Familistère (la presse régionale par exemple) » (ibid. : 25). On imagine ici tout le bénéfice qui pourrait être tiré aujourd’hui des usages nouveaux du Web dans la structuration de nos connaissances sur les expériences d’entreprises atypiques (réseaux sociaux, blogs, et autres forums, netnographie, cartographie des controverses, ontologies etc.). Une démultiplication des fouilles pourrait désormais s’ensuivre, permettant tout à la fois de dégager les communautés d’expériences, d’idées et d’intentionnalités et d’étudier plus en profondeur la façon dont elle se construisent et génèrent des débats.
C’est un fait largement établi, même parmi les plus anti-intellectualistes d’entre eux (Zobrist par exemple) : à côté de leur oralité effervescente, les entrepreneurs d’utopie écrivent beaucoup, et pas seulement sur leur expérience d’entreprise mais dans le domaine de la philosophie sociale et politique. C’est là d’ailleurs leur marque de fabrique. Déjà, R. Owen fut un plumitif respectable. E. Cabet et J.-B. Godin excipèrent d’une bibliographie copieuse. Plus près de nous, A. Olivetti marqua la vie intellectuelle, politiquejavascript:void(0) et sociale de son temps, beaucoup plus qu’il n’influença les milieux patronaux, toujours réticents face à son exigence de démocratie dans tous les registres de la société. On lui doit ainsi de nombreux ouvrages, la création d’une revue et d’une maison d’édition, adonnés à l’industrie certes, mais aussi à l’architecture, l’urbanisme ou l’esthétique, et reliés entre eux par le fil conducteur de la notion de comunità (Olivetti, 1946, 1960). Il en serait de même des pères fondateurs du complexe coopératif de Mondragòn et pas seulement du très pascalien José Maria Arizmendiarrieta (1999), l’initiateur, et les quinze volumes de ses œuvres complètes, mais également de ses descendances intellectuelles prolifiques (par ex. Azurmendi, 1992 ; Ormaetxea, 1997). Nous l’avons vu, la récolte sur les entreprises libérées actuelles ne serait pas moins abondante. Mais à l’exception sans doute de M. Hervé dont les ambitions théoriques tranchent sur le périmètre plus modestement managérial de ses contemporains (Hervé et alii, 2007 ; Hervé & Brière, 2012), il faut bien souvent se contenter de témoignages de seconde main ou de formalisations disséminées dans des colloques, thèses ou revues de dialogue entre chercheurs et praticiens (Futuribles, Harvard Business Review, Sloan Management Review …).
Sur ce point, les archives historiographiques vouées aux expériences les plus lointaines seraient paradoxalement plus plantureuses et plus précises, avec leurs relevés méticuleux en eaux profondes. L’expérience de l’Icarie d’E. Cabet en fournit le prototype, avec les innombrables écrits d’E. Cabet lui-même, ses témoins exaltés et ses contre-témoins désenchantés, ses observateurs de première main et ceux de deuxième main (Crétinon & Lacour, 1855, rééd. Par Rude 1952 ; Francis et Gonthier, 1983), sans oublier les forages intensifs de son historien attitré, Jules Prudhommeaux, (1907) et les fouilles successives dont elle fit l’objet pour servir à l’épopée du socialisme et du communisme (notamment chez Ch. Gide). Tout semble en effet présent dans ce vertigineux gisement documentaire : depuis les protocoles les plus détaillés des prises de décision et des débats en réunion, jusqu’à l’organisation et les disciplines du travail, en passant par les politiques de rémunération égalitaire, les controverses qu’elles suscitent en même temps que les contestations sur le leadership de Cabet. Il en irait de même pour l’expérience de R. Owen à New Lanark (Écosse), puis à New Harmony (Indiana) et sa fondation d’une bourse du travail à Londres. Plus récemment, dans son approche sociohistorique du Familistère de Guise, M. Lallement a confirmé de brillante façon la fécondité de cette démarche documentaire. Moyennant l’évitement de « quelques pièges » il argumente, lui aussi, sur la validité sociologique du « prisme biographique », « tant il est vrai que l’expérience individuelle [celle de Godin en l’espèce] est un fil d’Ariane qui mène rapidement vers des pratiques et des représentations collectivement partagées » (2009 : 22). Encore faut-il analyser « la parole et l’action de Godin en contexte » et savoir démêler « ce qui revient en propre au fondateur » [de l’expérimentation de Guise] (ibid. : 23-24). D’où la plongée dans des cartons d’archives et la fréquentation des historiens. Mais là encore, le matériau dont on dispose n’est pas neutre : « ce sont avant tout les conceptions de Godin et de ses proches qui sont mises en mots, rationalisées, objectivées, offertes à l’interprétation, rappelle Lallement. A défaut de supports […] aussi nombreux que ceux dont a pu bénéficier l’industriel picard, le monde et les avis des familles ouvrières sont plus difficiles à connaître et à décrypter. Ce biais méthodologique est difficilement contournable. J’ai tenté d’en limiter les effets en mobilisant, quand cela était possible, des sources extérieures au Familistère (la presse régionale par exemple) » (ibid. : 25). On imagine ici tout le bénéfice qui pourrait être tiré aujourd’hui des usages nouveaux du Web dans la structuration de nos connaissances sur les expériences d’entreprises atypiques (réseaux sociaux, blogs, et autres forums, netnographie, cartographie des controverses, ontologies etc.). Une démultiplication des fouilles pourrait désormais s’ensuivre, permettant tout à la fois de dégager les communautés d’expériences, d’idées et d’intentionnalités et d’étudier plus en profondeur la façon dont elle se construisent et génèrent des débats.
4.4. L’immersion totale et la pratique du « sic et non »
Une autre voie pourrait être empruntée, moins du côté de la construction des connaissances que de l’interaction entre connaissances et action. C’est la voie royale de l’immersion complète dans l’entreprise utopique. Henri Desroche en fut un adepte, lui qui vécut au détour des années 1940, pour le compte d’Économie et Humanisme, l’expérience du témoin embarqué (embedded), du scribe, du sparring partner, du « pseudo-boursier », voire de l’intellectuel organique, dans la Communauté de travail Boimondau (BOItiers de MONtres du DAUphiné). Il s’agissait alors d’une communauté productive parmi une bonne centaine à l’époque en France, en Belgique et en Suisse, « axée sur la propriété et la gestion communes des moyens de production (une moyenne entreprise d’horlogerie située à Valence) » (Desroche, 1992 : 63) Mais plus qu’une entreprise, l’entrepreneur horloger M. Barbu voulut construire une véritable cité, c’est-à-dire une communauté de communautés, groupant outre celle de travail, une communauté de vie, une communauté de culture ou d’éducation (avec son université ouvrière) et une communauté de conviction, « cellule mère d’une société nouvelle » (Ibid.). Selon Lago, sortant d’un vaste chantier bibliographique, H. Desroche aurait vécu là, à raison d’une semaine par mois, puis durant une année sabbatique complète (1950-1951) l’expérience fondatrice de « la communauté comme utopie pratiquée […] en effet, la rencontre avec la communauté de travail de Valence lui fait découvrir dans la réalité la possibilité d’une réalisation concrète de ce qui pouvait sembler utopique, au sens de ‘chimérique’ […] grâce aux difficultés internes observées chez Boimondau, la distinction [lui] deviendra évidente entre les mouvements utopiques, seulement rêvés ou écrits, et ceux qui ont été réellement pratiqués » (pp. 123-124).
Et pourquoi pas embrocher toutes ces sources de réflexion par l’analyse systématique des « dénonciations » chers aux théoriciens conventionnalistes ou par l’exercice de la vieille méthode scholastique du « sic et non » héritée d’Abélard ? En clair : quels argumentaires, quelles rhétoriques, utilisent les praticiens d’utopie pour dénoncer les entreprises conventionnelles et, à l’inverse, quels contre-arguments vont valoir ces dernières pour disqualifier les premiers, non sans imaginer toutes sortes de nuances dans chacun des deux camps, avec des « mais oui » ou des « oui mais… », des « non mais peut-être » ou des « non… mais pourquoi pas » ?
Une autre voie pourrait être empruntée, moins du côté de la construction des connaissances que de l’interaction entre connaissances et action. C’est la voie royale de l’immersion complète dans l’entreprise utopique. Henri Desroche en fut un adepte, lui qui vécut au détour des années 1940, pour le compte d’Économie et Humanisme, l’expérience du témoin embarqué (embedded), du scribe, du sparring partner, du « pseudo-boursier », voire de l’intellectuel organique, dans la Communauté de travail Boimondau (BOItiers de MONtres du DAUphiné). Il s’agissait alors d’une communauté productive parmi une bonne centaine à l’époque en France, en Belgique et en Suisse, « axée sur la propriété et la gestion communes des moyens de production (une moyenne entreprise d’horlogerie située à Valence) » (Desroche, 1992 : 63) Mais plus qu’une entreprise, l’entrepreneur horloger M. Barbu voulut construire une véritable cité, c’est-à-dire une communauté de communautés, groupant outre celle de travail, une communauté de vie, une communauté de culture ou d’éducation (avec son université ouvrière) et une communauté de conviction, « cellule mère d’une société nouvelle » (Ibid.). Selon Lago, sortant d’un vaste chantier bibliographique, H. Desroche aurait vécu là, à raison d’une semaine par mois, puis durant une année sabbatique complète (1950-1951) l’expérience fondatrice de « la communauté comme utopie pratiquée […] en effet, la rencontre avec la communauté de travail de Valence lui fait découvrir dans la réalité la possibilité d’une réalisation concrète de ce qui pouvait sembler utopique, au sens de ‘chimérique’ […] grâce aux difficultés internes observées chez Boimondau, la distinction [lui] deviendra évidente entre les mouvements utopiques, seulement rêvés ou écrits, et ceux qui ont été réellement pratiqués » (pp. 123-124).
Et pourquoi pas embrocher toutes ces sources de réflexion par l’analyse systématique des « dénonciations » chers aux théoriciens conventionnalistes ou par l’exercice de la vieille méthode scholastique du « sic et non » héritée d’Abélard ? En clair : quels argumentaires, quelles rhétoriques, utilisent les praticiens d’utopie pour dénoncer les entreprises conventionnelles et, à l’inverse, quels contre-arguments vont valoir ces dernières pour disqualifier les premiers, non sans imaginer toutes sortes de nuances dans chacun des deux camps, avec des « mais oui » ou des « oui mais… », des « non mais peut-être » ou des « non… mais pourquoi pas » ?
Conclusion
Les entrepreneurs d’utopie que nous avons étudiés ici ont tous en commun d’avoir été ou d’être des porteurs d’espérance. Ils affirment, qu’un autre monde est possible, du moins qu’un autre modèle d’entreprise n’est pas seulement pensable mais réalisable. A ce titre, ils occupent selon nous une place privilégiée parmi les tentatives le dépassement des formes actuellement dominantes d’organisation du travail et de gestion des systèmes productifs. On pourrait ironiser sur le caractère minoritaire et microscopique de leurs expériences. Ce serait oublier que la plupart d’entre elles se sont caractérisées par une réussite économique, une croissance, une durabilité et surtout une résilience bien souvent supérieures aux entreprises ordinaires. Mais ce serait également négliger qu’elles ont atteint ce haut niveau de performance en répondant en partie à des aspirations politiques et sociales aujourd’hui en plein essor pour faire face aux prétendus déterminismes économiques et à l’essoufflement des techniques managériales qui en sont bien souvent les servantes dociles. Refusant d’inféoder le fonctionnement de leurs entreprises à des normes de rentabilité à court terme ou à l’épouvantail de la mondialisation, les leaders libérateurs portent très haut une série d’idéaux que l’on croyait définitivement étrangers à l’univers de l’entreprise actuelle. Car il s’agit rien moins, pour la plupart d’entre, eux, d’envisager l’emploi comme priorité contre l’instrumentalisation rampante des ressources humaines ; de réintroduire la solidarité et l’action collective comme contrepoids aux ravages de l’individualisation croissante du rapport salarial ; de faire entrer la démocratie participative dans l’organisation en développant l’autonomie et l’initiative des salariés et en les traitant « intrinsèquement comme des égaux » (GorteTex) au lieu de les enserrer dans un univers de contraintes hiérarchiques toujours plus rigides et coûteuses ; de privilégier la vision stratégique, les finalités et les conditions sociétales de l’activité économique à long terme plutôt que de laisser toute la place au calcul et aux procédures ; de réhabiliter surtout le volontarisme politique et moral contre l’asthénie managériale livrée aux puissances occultes du marché (« il n’y aurait pas d’alternative », « les contraintes seraient telles que… »).
On voit bien quelle part de ré-enchantement et de rêve éveillé ces idéaux supposent. Mais les espérances des entrepreneurs d’utopie ne se sont-elles pas révélées finalement aussi crédibles que les « croyances déguisées en savoirs » de l’économisme (Guillebaud, 2005 : 29) ? A minima, elles nous rappellent deux facultés souvent oubliées des utopies sociales : leur potentiel socialement dynamogénique, c’est-à-dire leur performativité, pour passer de la doctrine singulière à l’action collective d’une part, et leur efficacité pédagogique, à titre d’assouplissement mental pour élargir nos systèmes de représentation d’autre part, ces deux fonctions appelant selon nous à leur tour, un renouvellement des recherches dans au moins deux directions.
La première concernerait un champ particulièrement large et multiple, incluant tout à la fois la sociologie des minorités actives, la sociologie de l’engagement (par ex. Becker, 2006) ou de l’action collective (voir le monumental travail de D. Cefaï, 2007), soit que l’on mette en évidence le rôle des idéaux, comme soutien de l’action dans les comportements managériaux en rupture, selon la formule nostalgiquement durkheimienne (« il y a toute une partie de la sociologie qui devrait rechercher les lois de l’idéation collective et qui est encore tout entière à faire », cité in Desroche, 1973 : 28 ; mais aussi un surprenant Dewey, 1934), soit que l’on mette au contraire les projets d’utopies entrepreneuriales sur le compte d’une « rationalité axiologique » qui aurait ses raisons (Boudon, 2012 : 47-56). Et pourquoi pas réembrayer sur l’étude sociologique des phénomènes de conversion pour rendre compte des dynamiques à l’œuvre lorsque les convictions des leaders rencontrent des résistances dans le corps social car, à en croire le témoignage de la plupart d’entre eux, créateurs ex-nihilo, repreneurs ou héritiers, la partie est rarement gagnée d’avance ? Déjà, de nombreux travaux sont sur les rangs (par ex. Snow, Machalek, 1984 ; Bourdet, 1986 ; Jacques Ion, 1997, 2012 ; Sociologies pratiques, 2007/2) et ne demanderaient qu’à s’approfondir.
Quant à la seconde fonction des utopies sociales ou d’entreprises, elle concernerait leur dimension pédagogique. C’est une vieille et belle idée chère à R. Ruyer (1950), grand analyste - et pourfendeur - des utopies, que de les cultiver comme « exercice mental » ou comme « un jeu sur les possibles latéraux à la réalité ». Une sorte d’exercice d’assouplissement mental, disions-nous, à l’usage des jeunes générations. Une idée qui ne demanderait qu’à être approfondie, notamment dans les programmes de formation attachés à produire des entrepreneurs créatifs plus que des managers dont la pléthore, à force de procédures de rationalisation et de techniques d’optimisation, a fini par rétracter notre imagination et contribué à grossir les rangs de ce que Gilbert Keith Chesterton appelait une « Église du pessimisme ». Du coup la contribution pédagogique des utopies d’entreprise ne serait-elle pas de taille à ouvrir un chapitre nouveau des Critical management studies aujourd’hui en plein développement dans un certain nombre d’établissements d’enseignement et de recherche en sciences de gestion (cf. HEC et son « Observatoire du management alternatif » et le CRCGM de Clermont-Université et sa chaire « Altergouvernance ») ?
On voit bien quelle part de ré-enchantement et de rêve éveillé ces idéaux supposent. Mais les espérances des entrepreneurs d’utopie ne se sont-elles pas révélées finalement aussi crédibles que les « croyances déguisées en savoirs » de l’économisme (Guillebaud, 2005 : 29) ? A minima, elles nous rappellent deux facultés souvent oubliées des utopies sociales : leur potentiel socialement dynamogénique, c’est-à-dire leur performativité, pour passer de la doctrine singulière à l’action collective d’une part, et leur efficacité pédagogique, à titre d’assouplissement mental pour élargir nos systèmes de représentation d’autre part, ces deux fonctions appelant selon nous à leur tour, un renouvellement des recherches dans au moins deux directions.
La première concernerait un champ particulièrement large et multiple, incluant tout à la fois la sociologie des minorités actives, la sociologie de l’engagement (par ex. Becker, 2006) ou de l’action collective (voir le monumental travail de D. Cefaï, 2007), soit que l’on mette en évidence le rôle des idéaux, comme soutien de l’action dans les comportements managériaux en rupture, selon la formule nostalgiquement durkheimienne (« il y a toute une partie de la sociologie qui devrait rechercher les lois de l’idéation collective et qui est encore tout entière à faire », cité in Desroche, 1973 : 28 ; mais aussi un surprenant Dewey, 1934), soit que l’on mette au contraire les projets d’utopies entrepreneuriales sur le compte d’une « rationalité axiologique » qui aurait ses raisons (Boudon, 2012 : 47-56). Et pourquoi pas réembrayer sur l’étude sociologique des phénomènes de conversion pour rendre compte des dynamiques à l’œuvre lorsque les convictions des leaders rencontrent des résistances dans le corps social car, à en croire le témoignage de la plupart d’entre eux, créateurs ex-nihilo, repreneurs ou héritiers, la partie est rarement gagnée d’avance ? Déjà, de nombreux travaux sont sur les rangs (par ex. Snow, Machalek, 1984 ; Bourdet, 1986 ; Jacques Ion, 1997, 2012 ; Sociologies pratiques, 2007/2) et ne demanderaient qu’à s’approfondir.
Quant à la seconde fonction des utopies sociales ou d’entreprises, elle concernerait leur dimension pédagogique. C’est une vieille et belle idée chère à R. Ruyer (1950), grand analyste - et pourfendeur - des utopies, que de les cultiver comme « exercice mental » ou comme « un jeu sur les possibles latéraux à la réalité ». Une sorte d’exercice d’assouplissement mental, disions-nous, à l’usage des jeunes générations. Une idée qui ne demanderait qu’à être approfondie, notamment dans les programmes de formation attachés à produire des entrepreneurs créatifs plus que des managers dont la pléthore, à force de procédures de rationalisation et de techniques d’optimisation, a fini par rétracter notre imagination et contribué à grossir les rangs de ce que Gilbert Keith Chesterton appelait une « Église du pessimisme ». Du coup la contribution pédagogique des utopies d’entreprise ne serait-elle pas de taille à ouvrir un chapitre nouveau des Critical management studies aujourd’hui en plein développement dans un certain nombre d’établissements d’enseignement et de recherche en sciences de gestion (cf. HEC et son « Observatoire du management alternatif » et le CRCGM de Clermont-Université et sa chaire « Altergouvernance ») ?
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