Le Temps des Equipes et des Projets

2.9 L'Attitude Zero Mépris en Management comme exercice de la Pertinence


Ethos managérial et conscience de soi :

Manager est un acte professionnel. Matar Mbaye, dans un article publié dans notre dernier numéro, suggère de faire appel au concept d' " Ethos managarial " pour désigner l'ensemble des comportements qui sont associés à cette fonction.

Le terme " Ethos " est séduisant car il permet d’associer deux mots qui en l’occurrence se complètent : celui de " Comportement " et celui " d’Ethique ". Dans son sens étymologique " Ethique " signifie à la fois " Comportement " et " Se tenir ". On peut conclure que Manager c’est aussi savoir " se tenir ". Hervé Serieyx a résumé cette attitude en utilisant le terme de Zéro Mépris.

Après le Zéro défaut, le Zéro papier, il nous propose de développer cette nouvelle " compétence ". Il la présente comme une nécessité si on veut bénéficier de la participation intelligente des collaborateurs. Le Zéro Mépris permet le " Don " des collaborateurs.

Nous savons que c’est un exercice difficile car cela passe par une plus grande conscience de soi. Le pouvoir affaiblit le " surmoi " et l’enfant pervers qui " souterrainement n’a jamais cessé d’exister en nous " peut profiter de l’occasion pour se réparer en manipulant sournoisement ses collaborateurs et les asservir à nos fantasmes. Nous avons décrit ce processus comme étant une forme de névrose que nous avons appelée " la névrose managériale ". Celle-ci a déjà fait de notre part, l'objet d'une sérieuse investigation.

Dans l’article sur la névrose managériale, nous avons en effet, insisté sur la nécessité de la pratique de la pertinence. Mais se contenter d’une simple exhortation serait pour le moins naïf. Pire, ce discours pourrait être pris comme un propos moralisant. Cette analyse, non seulement à juste raison, pourrait non seulement faire sourire mais serait prétentieuse.

L’exercice du pouvoir est aussi un exercice sur soi et en soi. Le pouvoir bienfaisant ne peut faire l’économie de l’interrogation permanente de la pertinence. Cette conviction ne repose pas seulement sur des convictions " éthiques " mais une économie des relations. La qualité de " l’Ethos managérial " est à la base de la coopération des acteurs. La trahison des idéaux ou pire des intérêts rend la vie sociale impossible. La confiance est dissoute et les acteurs passeront plus de temps à développer des stratégies qu'à confier à l’entreprise les idées ou les solutions qu’ils ont trouvées. L’innovation ne peut faire l’économie du Don donc de l’Ethique au sens Ethos.

La déclaration de Matsushita

" Nous allons gagner et l’Occident industriel va perdre !

Vous n’y pouvez plus grand chose, parce que c’est en vous-mêmes que vous portez votre défaite. Vos organisations sont tayloriennes ; mais le pire, c’est que vos têtes le sont aussi. Vous êtes totalement persuadés de faire bien fonctionner vos entreprises en distinguant d’un côté les chefs, de l’autre les exécutants ; d’un côté ceux qui pensent, de l’autre ceux qui vissent. Pour vous, le management c’est l’art de faire passer convenablement les idées des patrons dans les mains des ouvriers.

Nous, nous sommes post-tayloriens : nous savons que le business est devenu si compliqué, si difficile et la survie d’une firme si problématique, dans un environnement de plus en plus dangereux, inattendu et compétitif, qu’une entreprise doit chaque jour mobiliser toute l’intelligence de tous pour avoir une chance de s’en tirer. Pour nous, le management, c’est précisément l’art de mobiliser et d’engerber toute cette intelligence de tous, au service du projet de l’entreprise. Parce que nous avons pris, mieux que vous, la mesure des nouveaux défis technologiques et économiques, nous savons que l’intelligence de quelques technocrates, si brillants soient-ils, est dorénavant totalement insuffisante pour les relever. Seule l’intelligence de tous ses membres peut permettre à une entreprise d’affronter les turbulences et les exigences de son nouvel environnement.

C’est pour cela que nos grandes sociétés donnent trois ou quatre fois plus de formations à tout leur personnel que ne le font les vôtres ; c’est pour cela qu’elles entretiennent en leur sein un dialogue et une communication si denses, qu’elles sollicitent sans cesse les suggestions de tous et surtout qu’elles demandent, en amont au système éducatif national de leur préparer toujours plus de bacheliers, de généralistes éclairés et cultivés, terreau indispensable à une industrie qui doit se nourrir d’intelligence permanente.

Vos " patrons sociaux ", souvent gens de bonne volonté, croient qu’il faut défendre l’homme dans l’entreprise. Réalistes, nous pensons à l’inverse qu’il faut faire défendre l’entreprise par les hommes et que celle-ci leur rendra au centuple ce qu’ils lui auront donné. Ce faisant, nous finissons par être plus " sociaux " que vous. "

C'est bien beau tout ça ! Mais comment faire ?

Plusieurs moyens sont à notre disposition pour lutter contre cette tentation ?

Il convient de partir du principe qu’il est impossible d’être constamment pertinent. La capacité à discerner les comportements mis en scène dans certaines situations est essentielle. C’est par la prise de conscience que l’Homme grandit. Les actes du management deviennent dans cette perspective un exercice sur soi. C’est ce souci de favoriser la conscience de soi qui a inspiré le psychiatre Eric Berne. Nous lui empruntons deux outils de l’Analyse Transactionnelle considérés comme efficaces pour mieux analyser ses propres comportements et les interactions qu’ils suscitent. Ils permettent de consolider le Moi qui devient peu à peu plus lucide sur ce qui passe " ici et maintenant ". Nous associerons ces outils à des points clés du management comme le " holding " (soutien) et le " handing " (la façon de soutenir) en management. Ce sera une occasion de plus de s’interroger sur son propre style de management. (Nous en proposerons beaucoup d'autres).

Soutien et distance en Management

Les collaborateurs ont besoin d’être soutenus. Cette fonction d’appui s’appelle en psychothérapie le " holding " (Winnicott). Elle est indispensable lorsque le sujet est en crise.

La mise en performance n’est pas sans lien avec la crise dans la mesure où le sujet est appelé à mobiliser le maximum de ses ressources. Pour aller au-delà de son fonctionnement habituel, entrer dans un processus de dépassement, il a besoin de la présence de son manager.

Si celui-ci est trop " loin ", par exemple enfermé dans une approche trop technocratique, sa présence est insuffisante et la fonction d’étayage ne se fait pas.

Si le holding (soutien) est important, la manière de s’y prendre a autant d’importance.

Analyse style de management avec le test du PAE

En faisant référence à l’Analyse Transactionnelle, on peut mettre en évidence 6 styles prédominants :

- Le parent normatif est structurant mais souvent trop contrôlant.
- Le parent nourricier, très à l’écoute, est souvent trop protecteur.
- L’adulte garantit une certaine rationalité mais n’intègre pas toujours la dimension émotionnelle et affective dans sa relation.
- L’enfant libre emmène beaucoup de chaleur et de créativité mais trop proche n’occupe pas la fonction de leader.
- L’enfant adapté est discret mais a beaucoup de mal à prendre des décisions.
- L’enfant rebelle est capable de désobéir aux règles quand c’est nécessaire mais ne peut assurer une cohérence sociale.

Pour mieux comprendre les structures de la personnalité selon Eric Berne, consulter les deux topiques des Etats du Moi.

Le test du Style de Management est réservé à nos abonnés payants

Interprétation du test

Si c'est le Parent normatif qui l'emporte, vous êtes plutôt centré sur la loi, les règles, les résultats, les objectifs.

Si c'est le Parent Nourricier, vous êtes plus à l'écoute de vos collaborateurs. Vous êtes sur l'axe relationnel donc de la Foi.

Si c'est l'Adulte, vous privilégiez la méthode, les processus, l'organisation, la rationalité.

Si c'est L'Enfant Adapté, vous êtes sûrement un bon second mais avez du mal à prendre des décisions et trancher.

Si c'est l'Enfant Rebelle, vous êtes dans la contestation permanente mais vous savez dire non quand c'est nécessaire. Peut-être, êtes-vous également victime d'une " collection de timbres ". C'est-à-dire que vous accumulez certaines souffrances et vous avez besoin d'une régulation ou d'un changement.

Si c'est l'enfant Spontané ou Libre, vous avez beaucoup d'intuition et de spontanéité. Vous inspirez la sympathie mais votre franchise peut parfois mal être comprise.

Il existe un lien évident entre ce test et celui que nous vous avons proposé sur les deux axes fondamentaux du management : la Loi et la Foi.

Tous les tests présentés dans l’approche des 4 Temps du Management ne fonctionnent pas de manière séparée. Ils constituent un tout qui met en évidence certaines tendances qui se trouvent confirmées au fur et à mesure de votre auto-analyse.

Bibliographie

Le Zero Mépris par Hervé Serieyx

Comment en finir avec l'esprit de suffisance dans l'entreprise et ailleurs, Intereditions ; 1989, réédité en 1999 par Dunod, avec une nouvelle préface dans le cadre de l'opération " 100 ans de management " avec quatre autres livres mondiaux de référence.

Zéro défaut, zéro panne, zéro stock, zéro délai, zéro papier… on connaît la litanie de la qualité totale. Une chanson vide de sens si nous ne sommes pas capables d'exorciser nos démons intérieurs : méfiance hiérarchique, suffisance de castes, esprit de clocher, faible écoute des autres, refus des différences ou incapacité de les marier, médiocre aptitude au travail collectif, bref, si nous ne nous mettons pas en quête du seul zéro qui, seul, économique permet de viser tous les autres, " le zéro mépris ".

Le mépris stérilise toute coopération, nuit à l'efficacité économique, accroît les pesanteurs administratives, restreint le jeu de la démocratie : c'est le vrai cancer des organisations.

Illustré de nombreux exemples tirés des champs publics et privés, livre qui s'est diffusé à plus de 100 000 exemplaires, est devenu un standard du management et un manuel scolaire dans les formations à la gestion.

Un résumé détaillé du livre " O Mépris "

Hommage à Hervé Serieyx

La gestion des personnes et le pouvoir dans l'entreprise, la loyauté dans l'entreprise par Bruno Berthon



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