Les éditoriaux

Repenser les finalités des sciences de gestion : Une urgence !


Les récents événements climatiques  et les prophéties inquiétantes des tenants de l'anthropocène sont en train de révéler les limites du modèle qui a  inspiré jusqu'à présent les pratiques gestionnaires des acteurs économiques.

Produire en masse en incitant les consommateurs à consommer toujours plus sans évaluer les externalités négatives suscitées par de telles orientations introduit un doute sérieux quant aux principes qui les fondent. Le but des décideurs était clair : générer les profits les plus élevés possibles au bénéfice généralement du seul capital sans se soucier du bien commun.  Dans la sémantique, cela s’est traduit par un concept qui a fait flores dans les années 90 :  celui de « valeur actionnariale ». Concrètement, cela signifie que la vocation d’une entreprise vise ici avant tout  à maximiser la valeur des actions.

Cette seule finalité commencent à poser question. Le récent rapport réalisé par Nicole Notat et Jean – Dominique Senard en témoigne lorsqu’ils affirment qu’une entreprise ne peut se résumer « aux seuls intérêts particuliers des associés » (Notat, Senard, 2018) et qu’il est temps, que sa mission soit puisse aussi intégrer, si elle le souhaite, une mission d’intérêt général qui dépasse la seule dimension économique.  La loi Pacte, adoptée à la majorité par l'Assemblée Nationale le 9 Otobre 2018 a confirmé cette orientation. Le ministre de l’économie Bruno Lemaire annonce que cette loi va contribuer « à transformer notablement les entreprises françaises ».

L’institutionnalisation de cette nouvelle vocation, qui a été longtemps préparée par les démarches de RSE n’est pas sans conséquences sur les finalités des sciences de gestion. Celles – ci devront en effet, de plus en plus prendre en compte  l’impact des décisions sur l’environnement et la société toute entière. 

En introduisant, à travers cette loi, la dimension de l'intérêt général ce sont les finalités même de l’action collective des communautés entrepreneuriales qui sont remises en question et du coup les principes fondateurs des sciences de gestion qui y sont associés. Il s’agit donc d’une mutation majeure qui questionne leur épistémologie et sans doute aussi, bientôt,  plus concrètement leurs méthodologies. 

Ce qui nous intéresse dans cette métamorphose, c'est  le changement  des idéalités qui sont ici nouvellement convoquées.  Face aux catastrophes qui s'annoncent  avec une évidence angoissante, les sciences de gestion ne peuvent plus en effet rester closes sur elles mêmes. Elles sont dans la nécessité de s'ouvrir aux nouveaux enjeux planétaires qui se préparent. 

Dans leur histoire, Il s'agit bien d'un moment d'exception dans la mesure où elles devront se détacher des croyances  qui les ont  animées. Si elles persistaient dans leur attachement à celles - ci ,  cela pourrait générer une crise sans précédent car il semble entreprendre aujourd’hui ne puissent plus  se concevoir non seulement sans nuire à la planète mais aussi sans vouloir la sauver.

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