Le Journal Officiel fait régulièrement paraître les termes officiels de la langue française, qui doivent notamment être utilisés de préférence à leurs équivalents étrangers dans le cadre des activités administratives. Le développement d'Internet, la naissance de la monnaie européenne ou l'apparition de techniques commerciales nouvelles donne lieu à une série de préconisations formelles. Par exemple, le terme " Mél " peut contracter " Messagerie Electronique " sur une carte de visite, à l'instar de son précurseur " Tél ". La version substantive n'est pas autorisée. L'usage de " courriel " pour " e-mail " se généralisera peut-être, à moins que le mot subisse le même sort que épinglette, saucipain ou cogriffage qui n'ont jamais réellement remplacé " pins ", " hot dog " et " cobranding ". En attendant, la suisse montre (Swiss Watch) est devenue une marque célèbre...
L'exercice de création verbale par télescopage de mots a été rendu célèbre par Lewis Caroll, qui proposa d'ailleurs d'appeler " portmanteau words " ou mot-valise (en français) le résultat de ces mélanges. Le " smog " entre fumée et brouillard, le " brunch " entre breakfast et lunch, créations anglo-saxonnes du début du XIXème siècle, sont désormais entrées dans notre vocabulaire. La contraction d'un mot et l'ajout d'un préfixe grec ou latin est une autre forme de bissociation verbale : c'est le cas de l'hydrocution (exécution par l'eau) ou de la contraception (contre la conception). On retrouve ce type de construction dans l'appellation des collectionneurs ou des troubles psychologiques : le briquetophile collectionne des briquets, l'éthylabélophile amasse des étiquettes de bouteille d'alcool, les triskaiderphobes ont peur du chiffre 13, et les écrivains qui redoutent la page blanche souffrent de leucosélophobie...
Les linguistes distinguent deux catégories de mots-valises : les mots gigognes dans lesquels la première syllabe du second mot coïncide précisément avec la dernière syllabe du premier (calembourrique : âne spécialisé dans les mots d'esprit), et les mots sandwiches, où les syllabes se mêlent les unes aux autres (rébarbutant : non seulement rébarbatif mais aussi rebutant, ou transistor : contraction de transfer resistor).
Proposons, pour conclure ce chapitre, quelques définitions bissociatives adaptées à la créativité :
- créatologie : étude scientifique de la création
- méthodysée : grand voyage dans le monde des méthodes de découverte
- oniriche : qui accède à des idées très fertiles pendant ses rêves
- latérallye : compétition où les concurrents s'affrontent en pensée latérale,
- associhâtif : lecteur pressé d'aborder le prochain chapitre consacré aux démarches d'association d'idées...
Proposons, pour conclure ce chapitre, quelques définitions bissociatives adaptées à la créativité :
- créatologie : étude scientifique de la création
- méthodysée : grand voyage dans le monde des méthodes de découverte
- oniriche : qui accède à des idées très fertiles pendant ses rêves
- latérallye : compétition où les concurrents s'affrontent en pensée latérale,
- associhâtif : lecteur pressé d'aborder le prochain chapitre consacré aux démarches d'association d'idées...
3. Les démarches associatives
Elles consistent à mieux percevoir le champ de références ouvert par l'énoncé d'un mot ou d'un concept pour effectuer des rapprochements entre plusieurs objets ou idées.
3.1 La carte mentale
La carte mentale est l'outil le plus couramment utilisé pour représenter les associations d'idées qui naissent à l'énoncé d'un mot ou d'un concept. La méthode systématique (connue sous le nom " mind map ") a été développée par le britannique Tony Buzan, dont l'ouvrage de référence " Une tête bien faite " a été publié à plus d'un million d'exemplaires et traduit dans une vingtaine de langues. Tony Buzan y présente des techniques d'apprentissage fondées sur l'exploration de notre " potentiel d'idéation ". Sa méthode vise notamment à " muscler " la mémoire, lire plus vite, prendre des notes et à visualiser différemment des solutions à un problème. Elle part du principe que l'écriture linéaire depuis le haut jusqu'au bas de la page ne correspond pas naturellement à notre fonctionnement cérébral :
ce mode de prise de notes ou d'écriture fige notre perception des idées, bloque notre capacité à établir des liaisons. Notre cerveau fonctionne en effet par enchaînements et intégrations de concepts clés, ce dont le tracé linéaire traditionnel ne peut rendre compte. C'est pourquoi Buzan propose de placer les idées par ramifications successives à partir d'un thème central.
ce mode de prise de notes ou d'écriture fige notre perception des idées, bloque notre capacité à établir des liaisons. Notre cerveau fonctionne en effet par enchaînements et intégrations de concepts clés, ce dont le tracé linéaire traditionnel ne peut rendre compte. C'est pourquoi Buzan propose de placer les idées par ramifications successives à partir d'un thème central.
On travaille sur un objet courant : la canne.
On place au centre de la feuille le mot, et on écrit toutes les idées que l'on associe spontanément. Certaines branches peuvent être complétées, d'autres restent en suspens. Des connexions apparaissent (ou non) après coup. Des flèches peuvent figurer des rapprochements possibles.
A partir d’un mot central, il est ainsi possible d’explorer " graphiquement " toutes les évocations associées directement ou indirectement face au " stimulus " proposé. L’exploitation des cartes mentales permet de formaliser directement des liaisons (cause, effet, parenté, …) entre un sujet donné et les fondements subjectifs de la perception.
On place au centre de la feuille le mot, et on écrit toutes les idées que l'on associe spontanément. Certaines branches peuvent être complétées, d'autres restent en suspens. Des connexions apparaissent (ou non) après coup. Des flèches peuvent figurer des rapprochements possibles.
A partir d’un mot central, il est ainsi possible d’explorer " graphiquement " toutes les évocations associées directement ou indirectement face au " stimulus " proposé. L’exploitation des cartes mentales permet de formaliser directement des liaisons (cause, effet, parenté, …) entre un sujet donné et les fondements subjectifs de la perception.
3.2 Le " circept " ou concept circulaire.
L’ensemble des évocations recueillies par la carte mentale peut ensuite être organisé à partir d’un deuxième outil, développé par Michel Fustier : le " circept " ou concept circulaire. La méthode développée par ce spécialiste de la socio-économie repose sur une série d’expérimentations originales dans le domaine de la " représentation dialectique " (Pour un exposé de la méthode, suivi d’un débat, on lira avec profit " Dix visions sur la communication humaine ", Presses Universitaires de Lyon, 1981). Son travail a trouvé des applications pratiques très concrètes dans des domaines variés : psychologie sociale, marketing (positionnement), pédagogie,…
Il repose sur l’idée que chaque concept (mot, idée complexe, situation sociale) peut être représenté sous une forme circulaire afin de mettre en évidence les tensions inhérentes au sujet. Ces tensions ne correspondent pas nécessairement à des oppositions (blanc / noir), mais peuvent correspondre à des complémentarités, des nuances le long de chaque axe.
Il repose sur l’idée que chaque concept (mot, idée complexe, situation sociale) peut être représenté sous une forme circulaire afin de mettre en évidence les tensions inhérentes au sujet. Ces tensions ne correspondent pas nécessairement à des oppositions (blanc / noir), mais peuvent correspondre à des complémentarités, des nuances le long de chaque axe.
Dans l'ouvrage collectif L'Inventique paru en 1970 (A. Kaufmann, M. Fustier, A. Drevet, L'Inventique, Entreprise Moderne d'Edition), Michel Fustier raconte comment est née l'idée de circept tandis qu'il recensait une cinquantaine d'associations d'idées et d'analogies autour du terme " chef d'entreprise " : " Les images ont été données en vrac, s'opposent ou s'appelant les unes les autres. Mais, sous cet apparent désordre, se cachait une structure. En effet, d'une part chaque image, ou chaque groupe d'images, était proche d'une image ou d'un autre groupe d'images, et, d'autre part, on pouvait trouver dans la liste fournie des images absolument contraires les unes aux autres. En vertu de ces deux caractéristiques, il était donc possible de ranger ces images autour d'une forme circulaire, chaque point de la figure ayant ainsi des voisinages et des oppositions ".
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