Résumé :
Jusqu’à présent, la création d’emplois a toujours été envisagée à partir d’incitations visant à réduire le coût du travail. Cette politique n’est pas sans effets mais elle pourrait à moyen terme mettre en danger le financement de notre protection sociale. Elle repose sur une vision strictement comptable de la " Valeur Travail " en oubliant étrangement que la rémunération contribue aussi à travers la redistribution " républicaine " des prestations sociales au bien être de la collectivité toute entière.
D’autres alternatives existent encourageant notamment les entreprises à l’innovation à valeur ajoutée. Cette hypothèse a donné naissance aux pôles de compétitivité dont l’efficacité repose sur le rapprochement d’entreprises (généralement plutôt grandes) et des centres de recherches universitaires sur un territoire.
Cependant dans ce nouveau dispositif, il semble que les PME, en particulier les petites et moyennes soient sous représentées alors que ce sont elles qui sont le plus créatrices d’emplois. Cette dynamique s’explique par le fait que les entrepreneurs de PME se caractérisent par une capacité à imaginer sans cesse de nouveaux projets.
Cet article se propose d’explorer les fondements anthropologiques de l’imaginaire entrepreunariale tout en se demandant comment réveiller et soutenir les projets économiques dormants innovants dans les PME, source négligée de créations d’emplois.
D’autres alternatives existent encourageant notamment les entreprises à l’innovation à valeur ajoutée. Cette hypothèse a donné naissance aux pôles de compétitivité dont l’efficacité repose sur le rapprochement d’entreprises (généralement plutôt grandes) et des centres de recherches universitaires sur un territoire.
Cependant dans ce nouveau dispositif, il semble que les PME, en particulier les petites et moyennes soient sous représentées alors que ce sont elles qui sont le plus créatrices d’emplois. Cette dynamique s’explique par le fait que les entrepreneurs de PME se caractérisent par une capacité à imaginer sans cesse de nouveaux projets.
Cet article se propose d’explorer les fondements anthropologiques de l’imaginaire entrepreunariale tout en se demandant comment réveiller et soutenir les projets économiques dormants innovants dans les PME, source négligée de créations d’emplois.
1. Etat d’urgence : l’emploi à l’épreuve de la mondialisation
Les indicateurs de l’emploi fonctionnent comme des révélateurs de la santé économique d’un pays. Ils nous indiquent que l’économie française est peut-être en déclin (Baverez N., 2004) ou encore qu’elle connaît une mutation radicale :
- Elle détruit plus d’emplois qu’elle n’en crée : fin 2008, le solde de création d’emplois est négatif (-92745)
- Le taux de chômage, en 2009, des personnes en recherche d’emploi de catégorie 1, est de 9,1% alors qu’il était de 8,2 en 2008. Le ministre du travail Xavier Darcos prévoit 800.000 chômeurs supplémentaires entre septembre et décembre. En 2004, le nombre de chômeurs de longue durée (plus d’un an) représente environ 31,1% de la population totale des chômeurs ; en 2007 ce chiffre monte à 40,4%
- Les emplois créés sont de plus en plus précaires ou à temps partiel : le nombre de CDD est passé de 5,2% à 12,3% entre 1982 et 2009 tandis que le nombre de salariés à temps partiel est passé de 8,5% à 14% durant la même période. Le nombre de salariés en emploi instable serait, en 2009, de 26,6%
- Le taux d’emploi des jeunes (- 26 ans) et des séniors (+ de 54 ans) est un des plus bas de l’Europe. Il serait, respectivement, de 31,2% pour le premier et de 38,2% pour le second.
- Enfin, le nombre de personnes au RMI est passé entre 2005 à 2009 de 900.000 à 1 130.000. En 2005, c’est déjà près de 6 millions de personnes qui bénéficient des minimas sociaux.
Cette dynamique globalement déficitaire est évidemment particulièrement exacerbée dans le secteur industriel qui est le plus confronté à la concurrence mondiale. Cette difficulté s’est traduite en 2008 par une perte de 70 000 emplois qui n’a pas été compensée par les créations d’emplois du secteur tertiaire qui connait lui aussi une diminution annuelle de 0,2% soit - 28600 salariés.
- Elle détruit plus d’emplois qu’elle n’en crée : fin 2008, le solde de création d’emplois est négatif (-92745)
- Le taux de chômage, en 2009, des personnes en recherche d’emploi de catégorie 1, est de 9,1% alors qu’il était de 8,2 en 2008. Le ministre du travail Xavier Darcos prévoit 800.000 chômeurs supplémentaires entre septembre et décembre. En 2004, le nombre de chômeurs de longue durée (plus d’un an) représente environ 31,1% de la population totale des chômeurs ; en 2007 ce chiffre monte à 40,4%
- Les emplois créés sont de plus en plus précaires ou à temps partiel : le nombre de CDD est passé de 5,2% à 12,3% entre 1982 et 2009 tandis que le nombre de salariés à temps partiel est passé de 8,5% à 14% durant la même période. Le nombre de salariés en emploi instable serait, en 2009, de 26,6%
- Le taux d’emploi des jeunes (- 26 ans) et des séniors (+ de 54 ans) est un des plus bas de l’Europe. Il serait, respectivement, de 31,2% pour le premier et de 38,2% pour le second.
- Enfin, le nombre de personnes au RMI est passé entre 2005 à 2009 de 900.000 à 1 130.000. En 2005, c’est déjà près de 6 millions de personnes qui bénéficient des minimas sociaux.
Cette dynamique globalement déficitaire est évidemment particulièrement exacerbée dans le secteur industriel qui est le plus confronté à la concurrence mondiale. Cette difficulté s’est traduite en 2008 par une perte de 70 000 emplois qui n’a pas été compensée par les créations d’emplois du secteur tertiaire qui connait lui aussi une diminution annuelle de 0,2% soit - 28600 salariés.
2. Le succès mitigé des politiques de l’emploi
Les gouvernements successifs qu’ils soient de gauche ou de droite ont fait appel à plusieurs types de solutions pour résoudre le problème de l’emploi, mais aucune ne s’est avérée, définitivement, concluante.
- En 1995, le Gouvernement " Juppé ") s’est efforcé de diminuer le poids des charges sociales en abaissant les cotisations sociales des bas salaires. Cette politique aurait permis la création d’environ 400.000 emplois.
- En 1998, Martine Aubry, alors Ministre du travail est confrontée à un taux de chômage de 12,6%. Elle propose de partager le temps de travail, en réduisant la durée hebdomadaire légale du travail à 35h. Cette initiative serait à l’origine de la création de 350.000 emplois.
- Au 1er janvier 2009, Laurent Wauquiez, secrétaire d’Etat à l’emploi exonère de charges, pendant un an toute embauche rémunérée au SMIC, en réservant cette mesure aux PME de - de 10 salariés. 9 mois après sa promotion, cette mesure aura permis, dans un contexte de crise, la création de 170.000 emplois.
Cependant, malgré un impact évident à un instant donné, ces dispositifs sont restés défensifs et endogènes. Ils n’ont pas permis de réduire de façon " durable " le chômage et encore moins la montée de la pauvreté.
Par ailleurs, toutes ces mesures, y compris celles des 35 heures, interviennent au niveau du coût du travail, ce qui n’est pas sans conséquences sur la capacité du pays à financer la protection sociale. On peut estimer qu’il y a un lien direct entre la baisse du montant global des cotisations sociales et le déficit de la Sécurité Sociale qui s’élève aujourd’hui à 21 milliards d’Euros. Ce déficit, n’est pas à notre sens seulement dû à l’augmentation du nombre de chômeurs comme on l’évoque souvent mais aussi à la diminution de la " Valeur Travail " qui ne permet plus aujourd’hui de financer sans déficit la protection sociale.
Michel Rocard estimait que " seule une croissance durable de 3% par an, pendant 10 ans pourrait résoudre le problème ". Or le PIB moyen de ces trois dernières années est de 1,63% et il chuterait fin 2009 selon l’Insee à - 2,5%.
- En 1995, le Gouvernement " Juppé ") s’est efforcé de diminuer le poids des charges sociales en abaissant les cotisations sociales des bas salaires. Cette politique aurait permis la création d’environ 400.000 emplois.
- En 1998, Martine Aubry, alors Ministre du travail est confrontée à un taux de chômage de 12,6%. Elle propose de partager le temps de travail, en réduisant la durée hebdomadaire légale du travail à 35h. Cette initiative serait à l’origine de la création de 350.000 emplois.
- Au 1er janvier 2009, Laurent Wauquiez, secrétaire d’Etat à l’emploi exonère de charges, pendant un an toute embauche rémunérée au SMIC, en réservant cette mesure aux PME de - de 10 salariés. 9 mois après sa promotion, cette mesure aura permis, dans un contexte de crise, la création de 170.000 emplois.
Cependant, malgré un impact évident à un instant donné, ces dispositifs sont restés défensifs et endogènes. Ils n’ont pas permis de réduire de façon " durable " le chômage et encore moins la montée de la pauvreté.
Par ailleurs, toutes ces mesures, y compris celles des 35 heures, interviennent au niveau du coût du travail, ce qui n’est pas sans conséquences sur la capacité du pays à financer la protection sociale. On peut estimer qu’il y a un lien direct entre la baisse du montant global des cotisations sociales et le déficit de la Sécurité Sociale qui s’élève aujourd’hui à 21 milliards d’Euros. Ce déficit, n’est pas à notre sens seulement dû à l’augmentation du nombre de chômeurs comme on l’évoque souvent mais aussi à la diminution de la " Valeur Travail " qui ne permet plus aujourd’hui de financer sans déficit la protection sociale.
Michel Rocard estimait que " seule une croissance durable de 3% par an, pendant 10 ans pourrait résoudre le problème ". Or le PIB moyen de ces trois dernières années est de 1,63% et il chuterait fin 2009 selon l’Insee à - 2,5%.
3. Coût du travail et compétitivité prix
L’analyse des licenciements qui ont lieu de façon massive dans certains secteurs, en particulier (textile, électronique), met en évidence que la destruction des emplois en France relève d’une logique bien identifiée. Elle semble en effet, s’acharner sur un type d’entreprises qui se caractérisent par des formules stratégiques, s’inscrivant dans la compétitivité Prix.
L’analyse de certains secteurs d’activités confirme aisément cette hypothèse :
Dans le secteur du textile, l'emploi en Europe a diminué de 30, 1 % de 1995 à 1998 pour progresser de 17, 2 % en Asie durant la même période (source Activités sectorielles du BIT). En France, on est passé entre 1989 et 2003 de 580 000 à 72000 salariés et on prévoit de se retrouver avec seulement 35000 salariés d’ici 2012 (source Insee). Le secteur de la fabrication d'équipements électriques, électroniques, informatiques, semble également particulièrement concerné avec en 2009 une perte nette d’emplois de 0,7% de sa main d’œuvre (source Insee) Dans le secteur automobile, on recense une perte nette de 48000 emplois disparus en 2009 (source Insee). Le secteur de l’intérim est lui aussi durement touché avec une diminution de 21,5 % de ses effectifs, soit – 154 700 salariés. Ces pertes d’emplois massives se sont traduites dans l’actualité par des conflits sociaux douloureux et violents comme : Moulinex, Cellatex, Reynolds, Faurecia, Pindières, Molex, etc.
La cause la plus souvent évoquée par les directions de ce type d'entreprise, pour justifier les licenciements est le coût du travail. Il est clair que les coûts de main d'oeuvre en France sont plus élevés que dans certains pays de l'Est, d'Afrique du nord ou d'Asie. Ces deux dernières années, le secteur textile en Tunisie a vu la création de 20 000 emplois. Plus que destruction d'emplois, il conviendrait plutôt, donc, de parler de déplacements de la croissance en emplois.
Selon les chiffres de CDC-Ixis, le coût horaire du travail en France est 38 fois plus élevé qu’en Chine, alors qu’il l’est 54 fois plus en Allemagne.
L'ouverture non régulée des frontières ne fait qu'accentuer le phénomène. Dans le domaine du textile, l’ouverture des frontières au 1 janvier 2005 a été particulièrement remarquée : Depuis cette date, la Chine peut librement exporter sans limite de quotas, les vêtements qu'elle a confectionnés.
Certains accusent la mondialisation ultralibérale des marchés et de la concurrence d’être responsable de la destruction des emplois. D’autres, et non des moindres, comme le professeur Stiglitz (2005) récent prix Nobel en économie, reprochent aux institutions chargées de la régulation comme le FMI, l'OMC et la Banque Mondiale d’être sous l’emprise d’" idéologies " libérales au détriment d’un certain pragmatisme. .
D'une façon générale, on constate une absence affligeante d'anticipation alors que toutes les analyses prévisionnelles avaient été faites au niveau des différents organismes comme la DARES, le Commissariat du Plan, le Comité d'Analyse Economique, le Conseil Economique et Social qui ont publié depuis longtemps de nombreuses études mettant en évidence les risques encourus. Le capitaine du Titanic avait lui aussi reçu près de 5 messages avant de heurter un iceberg. Il croyait que son bateau était le plus solide du monde...
Christian Blanc, dans son rapport sur l’écosystème de la compétitivité (2004) estime que les solutions existent mais qu’il est urgent de se mobiliser : " Chaque année qui s'écoule dans le cadre actuel nous éloigne un peu plus des pays concurrents qui ont su s'adapter aux nouveaux modes de fonctionnement de l'économie ".
L’analyse de certains secteurs d’activités confirme aisément cette hypothèse :
Dans le secteur du textile, l'emploi en Europe a diminué de 30, 1 % de 1995 à 1998 pour progresser de 17, 2 % en Asie durant la même période (source Activités sectorielles du BIT). En France, on est passé entre 1989 et 2003 de 580 000 à 72000 salariés et on prévoit de se retrouver avec seulement 35000 salariés d’ici 2012 (source Insee). Le secteur de la fabrication d'équipements électriques, électroniques, informatiques, semble également particulièrement concerné avec en 2009 une perte nette d’emplois de 0,7% de sa main d’œuvre (source Insee) Dans le secteur automobile, on recense une perte nette de 48000 emplois disparus en 2009 (source Insee). Le secteur de l’intérim est lui aussi durement touché avec une diminution de 21,5 % de ses effectifs, soit – 154 700 salariés. Ces pertes d’emplois massives se sont traduites dans l’actualité par des conflits sociaux douloureux et violents comme : Moulinex, Cellatex, Reynolds, Faurecia, Pindières, Molex, etc.
La cause la plus souvent évoquée par les directions de ce type d'entreprise, pour justifier les licenciements est le coût du travail. Il est clair que les coûts de main d'oeuvre en France sont plus élevés que dans certains pays de l'Est, d'Afrique du nord ou d'Asie. Ces deux dernières années, le secteur textile en Tunisie a vu la création de 20 000 emplois. Plus que destruction d'emplois, il conviendrait plutôt, donc, de parler de déplacements de la croissance en emplois.
Selon les chiffres de CDC-Ixis, le coût horaire du travail en France est 38 fois plus élevé qu’en Chine, alors qu’il l’est 54 fois plus en Allemagne.
L'ouverture non régulée des frontières ne fait qu'accentuer le phénomène. Dans le domaine du textile, l’ouverture des frontières au 1 janvier 2005 a été particulièrement remarquée : Depuis cette date, la Chine peut librement exporter sans limite de quotas, les vêtements qu'elle a confectionnés.
Certains accusent la mondialisation ultralibérale des marchés et de la concurrence d’être responsable de la destruction des emplois. D’autres, et non des moindres, comme le professeur Stiglitz (2005) récent prix Nobel en économie, reprochent aux institutions chargées de la régulation comme le FMI, l'OMC et la Banque Mondiale d’être sous l’emprise d’" idéologies " libérales au détriment d’un certain pragmatisme. .
D'une façon générale, on constate une absence affligeante d'anticipation alors que toutes les analyses prévisionnelles avaient été faites au niveau des différents organismes comme la DARES, le Commissariat du Plan, le Comité d'Analyse Economique, le Conseil Economique et Social qui ont publié depuis longtemps de nombreuses études mettant en évidence les risques encourus. Le capitaine du Titanic avait lui aussi reçu près de 5 messages avant de heurter un iceberg. Il croyait que son bateau était le plus solide du monde...
Christian Blanc, dans son rapport sur l’écosystème de la compétitivité (2004) estime que les solutions existent mais qu’il est urgent de se mobiliser : " Chaque année qui s'écoule dans le cadre actuel nous éloigne un peu plus des pays concurrents qui ont su s'adapter aux nouveaux modes de fonctionnement de l'économie ".
4. La compétitivité hors prix et l’exportation au secours de l’emploi
A l'inverse, certaines entreprises semblent non seulement bien résister, mais également se développer. Ce qui est frappant c'est qu'elles sont toutes inscrites dans la compétitivité " hors prix ". Une étude menée par Philippe Trouvé de la Dares (1999), a mis en évidence que les PME qui créent le plus d'emplois sont celles qui " délaissent les lois de la production de masse et de la compétition par les coûts et qui sont capables d'établir un avantage concurrentiel... en s'appropriant les segments les plus créateurs de la chaîne de valeur ".
Les comportements stratégiques dits " hors prix " sont donc déterminants pour la création d'emplois. Ils reposent essentiellement aujourd'hui sur l'innovation. C'est la destruction de valeur au niveau de la fabrication qui explique la détérioration de l'emploi au niveau industriel en Europe.
L'exemple de certains pays, en particulier d'Europe du Nord est à ce sujet significatif. Ces pays ont un temps de travail annuel par salarié des plus faibles du monde et un PIB par habitant des plus élevés. Les indicateurs concernant le taux de chômage sont les plus faibles et le taux d'emploi des 15-64 ans des plus élevés. Depuis plusieurs décennies, ces pays affichent, d’après le fameux Institut IMD (International Institut for Management Development) des indicateurs économiques et sociaux plus performants que ceux de la France. Comment expliquer cela ? Certainement pas par l'approche " productiviste ". Ces pays ont réussi majoritairement à s'inscrire dans la compétitivité " hors prix ".
Nous avons également des exemples micro-économiques qui confirment cela : En septembre 2001, la société Moulinex doit déposer son bilan, 64 ans après sa création. 357 emplois sont supprimés. Son concurrent SEB positionné pourtant sur des produits plus chers mais à plus forte valeur ajoutée a beaucoup mieux résisté. Mieux même, il a racheté certaines marques à forte notoriété du groupe Moulinex.
Dans le secteur du textile, si on observe ceux qui survivent et se développent, on constate par exemple que l’entreprise de textile Deveaux S.A se développe encore malgré ses 200 ans d’existence. Le secret de sa croissance : 50% de son personnel, soit 300 salariés sur les 600 du groupe est dédié à la conception de dessins et modèles de vêtements plutôt que sur la fabrication.
L’export représente également une source de croissance réelle. Le déficit du commerce extérieur français en 2008 se situait à - 55,7 milliards d’Euros tandis que l’Allemagne réalise à la même époque un excédent de 103,4 milliards d’Euros.
90% des exportations en France sont réalisés par des grandes entreprises. Les entreprises de moins de 250 salariés ne représentent que 5% de la totalité des exportations. Or 98% du tissu économique français est composé d’entreprises de moins de 250 salariés. Les marges de manœuvre sont donc considérables. Mais elles reposent essentiellement sur les capacités entrepreunariales des acteurs.
Les comportements stratégiques dits " hors prix " sont donc déterminants pour la création d'emplois. Ils reposent essentiellement aujourd'hui sur l'innovation. C'est la destruction de valeur au niveau de la fabrication qui explique la détérioration de l'emploi au niveau industriel en Europe.
L'exemple de certains pays, en particulier d'Europe du Nord est à ce sujet significatif. Ces pays ont un temps de travail annuel par salarié des plus faibles du monde et un PIB par habitant des plus élevés. Les indicateurs concernant le taux de chômage sont les plus faibles et le taux d'emploi des 15-64 ans des plus élevés. Depuis plusieurs décennies, ces pays affichent, d’après le fameux Institut IMD (International Institut for Management Development) des indicateurs économiques et sociaux plus performants que ceux de la France. Comment expliquer cela ? Certainement pas par l'approche " productiviste ". Ces pays ont réussi majoritairement à s'inscrire dans la compétitivité " hors prix ".
Nous avons également des exemples micro-économiques qui confirment cela : En septembre 2001, la société Moulinex doit déposer son bilan, 64 ans après sa création. 357 emplois sont supprimés. Son concurrent SEB positionné pourtant sur des produits plus chers mais à plus forte valeur ajoutée a beaucoup mieux résisté. Mieux même, il a racheté certaines marques à forte notoriété du groupe Moulinex.
Dans le secteur du textile, si on observe ceux qui survivent et se développent, on constate par exemple que l’entreprise de textile Deveaux S.A se développe encore malgré ses 200 ans d’existence. Le secret de sa croissance : 50% de son personnel, soit 300 salariés sur les 600 du groupe est dédié à la conception de dessins et modèles de vêtements plutôt que sur la fabrication.
L’export représente également une source de croissance réelle. Le déficit du commerce extérieur français en 2008 se situait à - 55,7 milliards d’Euros tandis que l’Allemagne réalise à la même époque un excédent de 103,4 milliards d’Euros.
90% des exportations en France sont réalisés par des grandes entreprises. Les entreprises de moins de 250 salariés ne représentent que 5% de la totalité des exportations. Or 98% du tissu économique français est composé d’entreprises de moins de 250 salariés. Les marges de manœuvre sont donc considérables. Mais elles reposent essentiellement sur les capacités entrepreunariales des acteurs.
5. La passion téléologique des entrepreneurs de PME : la véritable source de création de valeur.
Les chercheurs en sciences de gestion ont jusqu’à présent, à quelques exceptions près, peu investi le champ de la PME. Par ailleurs, si de nombreux travaux ont été réalisés à propos de la logique compétence, ceux-ci se sont rarement aventurés à définir sérieusement la compétence entrepreunariale. C’est surtout Jean-Christian Fauvet et Jean René Fourtou (1985) qui se sont, selon nous, le plus efforcés de cerner celle-ci, notamment à partir d’une démarche s’appuyant sur des travaux de philosophes.
Pour ces auteurs, l’acte d’entreprendre ne saurait se confondre avec la seule maîtrise des techniques de gestion comptable ou commerciale. Il est antérieur à toutes ces pratiques. Entreprendre c’est toujours être à l’origine de quelque chose, c’est " être " à l’initiative d’un événement ; entreprendre c’est donc être créateur d’histoire (Sartre, 1996). Sans l’action de l’entrepreneur, il n’y aurait rien : " entreprendre, c’est changer la forme de la matière, continuer la création et peut – être même l’accomplir " (J-C Fauvet, J-R Fourtou, 2004)
L’acte d’entreprendre n’est pas au départ un processus rationnel, c’est une pulsion, un élan vital au sens de Bergson (2003) qui se transforme en volonté d’agir et donc d’être là : Etre là non pas pour jouir de l’instant présent comme les hédonistes le recherchent, mais transformer le monde. Etre là pour réaliser des projets et de façon plus générale pour atteindre un but, une fin (télos). Exister dans l’acte d’entreprendre c’est donc constamment se projeter dans un futur qu’on n’atteint jamais vraiment mais qui est moteur.
On peut concevoir que, dans cette dynamique, la vie de l’entrepreneur soit une aventure continuelle, un dépassement permanent de soi-même. Avec Maine de Biran (1995) on peut considérer que l’acte d’entreprendre est " une sortie permanente de soi pour se tendre vers un but ". Totalement engagé dans cette quête prométhéenne qui relève d’un Idéal du Moi exacerbé (Aubert, Gaulejac, 2007) il peut paraître, parfois, monstrueux pour l’homme ordinaire car il sort des conventions (P. Diel, 2002). Mais, en même temps, il peut aussi susciter une fascination sur ceux qui l’entourent et créer, par l’intensité de son ardeur un rassemblement autour de son projet. De l’extérieur, cette possession peut ressembler peut - être à une " transe " ? (Bastide, 2003).
Cette manière d’exister plonge l’être dans le risque. Pour atteindre son but, l’entrepreneur met en jeu son patrimoine, son énergie, sa réputation, sa santé, son temps, bref sa vie : " C’est seulement dans le risque de sa vie qu’on éprouve sa liberté " disait Hegel (2002).
Cette lecture anthropologique de l’entrepreneur explique sans doute les sources incessantes de la créativité entrepreunariale. Un entrepreneur vit toujours, même si celle-ci, n’est pas toujours formalisée avec une ou des visions du futur. Il échafaude, simule sans cesse des projets d’avenir pour son entreprise. Il est porteur d’une espérance inconditionnelle qui le pousse chaque fois qu’il en rencontre l’opportunité à actualiser ses rêves. Le véritable entrepreneur ne supporte pas les équilibres quasi-stationnaires. Il a besoin pardessus de tout de créer les déséquilibres qui lui donneront la sensation d’un mouvement. C’est donc un être de projet toujours en effervescence (Desroches ,1973), puisqu’il ne se contente pas de l’instant présent.
Mais son action ne se limite pas à lui-même. Par ce désir effervescent du futur, il rassemble et inspire la communauté toute entière. Sa passion est généralement contagieuse. Elle contribue à transformer l’organisation en un lieu de " fomentation " de projets (Boutinet, 2004).
Eugène Enriquez (1999) nous rappelle à ce propos " qu’une organisation qui ne rêve pas est une organisation qui meurt ". Une organisation vivante est donc traversée du désir de ceux qui l’habitent. C’est de celui-ci qu’elle tire sa capacité d’action. On comprend à la lumière de cette théorie qu’une organisation soit aussi un espace où l’activité de l’imaginaire est intense (Anzieu, 2007). Elle contient toujours un grand nombre de projets potentiels qu’elle tentera constamment d’actualiser (Lupasco, 1987). Parmi ces projets non actualisés, certains sont en phase d’émergence attendant qu’une opportunité permette de les réveiller.
Pour ces auteurs, l’acte d’entreprendre ne saurait se confondre avec la seule maîtrise des techniques de gestion comptable ou commerciale. Il est antérieur à toutes ces pratiques. Entreprendre c’est toujours être à l’origine de quelque chose, c’est " être " à l’initiative d’un événement ; entreprendre c’est donc être créateur d’histoire (Sartre, 1996). Sans l’action de l’entrepreneur, il n’y aurait rien : " entreprendre, c’est changer la forme de la matière, continuer la création et peut – être même l’accomplir " (J-C Fauvet, J-R Fourtou, 2004)
L’acte d’entreprendre n’est pas au départ un processus rationnel, c’est une pulsion, un élan vital au sens de Bergson (2003) qui se transforme en volonté d’agir et donc d’être là : Etre là non pas pour jouir de l’instant présent comme les hédonistes le recherchent, mais transformer le monde. Etre là pour réaliser des projets et de façon plus générale pour atteindre un but, une fin (télos). Exister dans l’acte d’entreprendre c’est donc constamment se projeter dans un futur qu’on n’atteint jamais vraiment mais qui est moteur.
On peut concevoir que, dans cette dynamique, la vie de l’entrepreneur soit une aventure continuelle, un dépassement permanent de soi-même. Avec Maine de Biran (1995) on peut considérer que l’acte d’entreprendre est " une sortie permanente de soi pour se tendre vers un but ". Totalement engagé dans cette quête prométhéenne qui relève d’un Idéal du Moi exacerbé (Aubert, Gaulejac, 2007) il peut paraître, parfois, monstrueux pour l’homme ordinaire car il sort des conventions (P. Diel, 2002). Mais, en même temps, il peut aussi susciter une fascination sur ceux qui l’entourent et créer, par l’intensité de son ardeur un rassemblement autour de son projet. De l’extérieur, cette possession peut ressembler peut - être à une " transe " ? (Bastide, 2003).
Cette manière d’exister plonge l’être dans le risque. Pour atteindre son but, l’entrepreneur met en jeu son patrimoine, son énergie, sa réputation, sa santé, son temps, bref sa vie : " C’est seulement dans le risque de sa vie qu’on éprouve sa liberté " disait Hegel (2002).
Cette lecture anthropologique de l’entrepreneur explique sans doute les sources incessantes de la créativité entrepreunariale. Un entrepreneur vit toujours, même si celle-ci, n’est pas toujours formalisée avec une ou des visions du futur. Il échafaude, simule sans cesse des projets d’avenir pour son entreprise. Il est porteur d’une espérance inconditionnelle qui le pousse chaque fois qu’il en rencontre l’opportunité à actualiser ses rêves. Le véritable entrepreneur ne supporte pas les équilibres quasi-stationnaires. Il a besoin pardessus de tout de créer les déséquilibres qui lui donneront la sensation d’un mouvement. C’est donc un être de projet toujours en effervescence (Desroches ,1973), puisqu’il ne se contente pas de l’instant présent.
Mais son action ne se limite pas à lui-même. Par ce désir effervescent du futur, il rassemble et inspire la communauté toute entière. Sa passion est généralement contagieuse. Elle contribue à transformer l’organisation en un lieu de " fomentation " de projets (Boutinet, 2004).
Eugène Enriquez (1999) nous rappelle à ce propos " qu’une organisation qui ne rêve pas est une organisation qui meurt ". Une organisation vivante est donc traversée du désir de ceux qui l’habitent. C’est de celui-ci qu’elle tire sa capacité d’action. On comprend à la lumière de cette théorie qu’une organisation soit aussi un espace où l’activité de l’imaginaire est intense (Anzieu, 2007). Elle contient toujours un grand nombre de projets potentiels qu’elle tentera constamment d’actualiser (Lupasco, 1987). Parmi ces projets non actualisés, certains sont en phase d’émergence attendant qu’une opportunité permette de les réveiller.
6. L’expérience Emergence : réveiller les projets économiques dormants sur un territoire
L’expérience Emergence s’est développée sur 1 an en Auvergne. Elle s’est inspirée du modèle ARDAN en Lorraine (Agence Régionale pour le Développement d’Activité Nouvelles). Elle a fonctionné avant l’heure comme un mini cluster, en réunissant des acteurs diversifiés souvent dispersés : DRTEFP, ESC Clermont, ANPE, ASSEDIC, APEC et ACTAN (société de conseil).
Le concept était simple. Il s’agissait de mettre en relation des entrepreneurs porteurs de projets économiques dormants innovants avec des cadres au chômage de longue durée disposant de compétences et de temps, dans le but de créer des activités nouvelles et à partir de là des " emplois durables ".
L’originalité de cette recherche action reposait sur une sélection rigoureuse des projets à partir de 4 critères :
1) Les projets devaient constituer une activité réellement innovante pour l’entreprise. Les démarches qualités, les restructurations organisationnelles et même l’optimisation des processus existants étaient, systématiquement, éliminés.
2) Ces projets innovants devaient avoir un impact significatif sur la valeur ajoutée globale de l’entreprise et contribuer à orienter la stratégie de l’entreprise vers la " compétitivité hors prix ".
3) L’entrepreneur devait évidemment s’engager à embaucher le cadre au chômage, chargé de faire passer le projet de sa phase d’émergence à sa phase de mise en œuvre. Le cadre bénéficiait pour cela du statut de stagiaire de formation pendant 9 mois.
4) Le dispositif ne devait, par ailleurs, en aucun cas servir à financer un emploi lié au développement normal de l’entreprise.
Pour faire émerger 30 projets économiques dormants crédibles, il a fallu contacter 2200 entreprises dont les indicateurs économiques révélaient une dynamique de croissance (par exemple 10% de croissance du CA et ou de l’effectif). 120 projets ont été modélisés par des consultants juniors de l’ESC Clermont. Les projets retenus étaient ensuite présentés par l’entrepreneur lui-même à un comité d’experts. Les hypothèses théoriques se sont avérées concluantes puisque l’opération s’est concrétisée par la création de 20 emplois de cadres qui ont généré 45 emplois de non cadres. Elle s’est poursuivie sur 5 ans avec succès dans le cadre d’un dispositif animé par la CRCI d’Auvergne.
Les entreprises choisies se situaient entre 10 à 100 salariés, là où la dynamique de création d’emplois est la plus forte (source Insee). C’est également dans cette catégorie d’entreprises qu’ont été recensées aussi les intentions d’embauches les plus nombreuses; ce qui est sans doute l’expression d’une dynamique de projets plus intense même si toutes ces intentions ne se transforment pas toutes en recrutement ferme.
Le concept était simple. Il s’agissait de mettre en relation des entrepreneurs porteurs de projets économiques dormants innovants avec des cadres au chômage de longue durée disposant de compétences et de temps, dans le but de créer des activités nouvelles et à partir de là des " emplois durables ".
L’originalité de cette recherche action reposait sur une sélection rigoureuse des projets à partir de 4 critères :
1) Les projets devaient constituer une activité réellement innovante pour l’entreprise. Les démarches qualités, les restructurations organisationnelles et même l’optimisation des processus existants étaient, systématiquement, éliminés.
2) Ces projets innovants devaient avoir un impact significatif sur la valeur ajoutée globale de l’entreprise et contribuer à orienter la stratégie de l’entreprise vers la " compétitivité hors prix ".
3) L’entrepreneur devait évidemment s’engager à embaucher le cadre au chômage, chargé de faire passer le projet de sa phase d’émergence à sa phase de mise en œuvre. Le cadre bénéficiait pour cela du statut de stagiaire de formation pendant 9 mois.
4) Le dispositif ne devait, par ailleurs, en aucun cas servir à financer un emploi lié au développement normal de l’entreprise.
Pour faire émerger 30 projets économiques dormants crédibles, il a fallu contacter 2200 entreprises dont les indicateurs économiques révélaient une dynamique de croissance (par exemple 10% de croissance du CA et ou de l’effectif). 120 projets ont été modélisés par des consultants juniors de l’ESC Clermont. Les projets retenus étaient ensuite présentés par l’entrepreneur lui-même à un comité d’experts. Les hypothèses théoriques se sont avérées concluantes puisque l’opération s’est concrétisée par la création de 20 emplois de cadres qui ont généré 45 emplois de non cadres. Elle s’est poursuivie sur 5 ans avec succès dans le cadre d’un dispositif animé par la CRCI d’Auvergne.
Les entreprises choisies se situaient entre 10 à 100 salariés, là où la dynamique de création d’emplois est la plus forte (source Insee). C’est également dans cette catégorie d’entreprises qu’ont été recensées aussi les intentions d’embauches les plus nombreuses; ce qui est sans doute l’expression d’une dynamique de projets plus intense même si toutes ces intentions ne se transforment pas toutes en recrutement ferme.
7. Les entrepreneurs : la richesse d’une nation.
Un de nos clients a racheté il y a quelques années une PME industrielle de 30 salariés spécialisés dans la fabrication de pylônes à structure métallique pour la téléphonie mobile. Après deux ans de croissance, l’entreprise a connu des pertes significatives qui ont entrainé une disparition quasi-totale de ses fonds propres. Les experts financiers avaient estimé que cette entreprise était économiquement morte. Selon les canons de l’académie, ce point de vue pouvait même paraître sans appel). Mais le dirigeant était persuadé qu’un retour vers la croissance était possible, même si ses idées étaient encore confuses. Il était habité par une sorte de conviction intrinsèque tout aussi réelle que l’anéantissement de ses ressources financières. Durant cette période de crise, cette entreprise a été maintenue en vie uniquement par la conviction et la détermination inébranlable du dirigeant. Pour survivre et obtenir un répit momentané, il a plaidé un plan de redressement qui a été accepté davantage à cause de son charisme qu’à l’analyse rationnelle de la situation de l’entreprise.
Aujourd’hui, celle-ci s’est diversifiée dans la fabrication d’éoliennes et de panneaux solaires. Elle a su transférer ses savoir-faire dans d’autres domaines à forte croissance. Elle a non seulement retrouvé une croissance à deux chiffres mais aussi une rentabilité qui lui a permis de reconstituer ses fonds propres. Cette expérience extrême montre que derrière les ressources mobilisées, ce qui importe, avant tout, c’est l’esprit de l’entrepreneur. Il ne se voit pas toujours dans les tableaux de bord froids de la gestion, mais il s’éprouve en le vivant.
L’entrepreneur de Schumpeter n’est pas l’homme du calcul ou du profit. Il " crée sans répit " parce qu’il est mû par un ensemble de mobiles irrationnels dont les principaux sont : la volonté de puissance, le goût sportif de la victoire, la joie de créer et donner forme à ses conceptions (François Perroux, 1993). Pour atteindre ses buts, il doit souvent vaincre des résistances, s’opposer aux circonstances. Il est celui qui est capable de sortir des routines pour faire des combinaisons nouvelles favorisant le surgissement de l’innovation : innovation produits, de procédés, de technique inédite, de marchés…
La renaissance illustre parfaitement cet idéal type. Les navigateurs, comme Christophe Colomb, Vasco de Gama, ne se sont pas contentés du confort douillet des honneurs de la cour. Leur volonté de découvrir le monde et d’ouvrir de nouveaux espaces commerciaux était plus forte que tout. Ils ne concevaient leur accomplissement personnel qu’à travers l’aventure.
Comme les explorateurs de cette époque les entrepreneurs sont visiblement animés par les mêmes valeurs d’aventure et de liberté. Diverses enquêtes menées par le CCA (Centre de Communication Avancée) et la Cofremca ont confirmé que la motivation première d’un entrepreneur était le besoin d’indépendance et d’autonomie.
Ces valeurs entrent en contradiction avec les valeurs dominantes de la société actuelle qui semble, paradoxalement, face à l’angoisse du lendemain et un monde complexe, plus que jamais se tourner vers des valeurs de sécurité et d’ordre. C’est sans doute ce qui explique l’opposition fréquente que peut rencontrer un entrepreneur lorsqu’il expose son projet, sollicite des fonds ou pire encore lorsqu’il échoue.
Aujourd’hui, celle-ci s’est diversifiée dans la fabrication d’éoliennes et de panneaux solaires. Elle a su transférer ses savoir-faire dans d’autres domaines à forte croissance. Elle a non seulement retrouvé une croissance à deux chiffres mais aussi une rentabilité qui lui a permis de reconstituer ses fonds propres. Cette expérience extrême montre que derrière les ressources mobilisées, ce qui importe, avant tout, c’est l’esprit de l’entrepreneur. Il ne se voit pas toujours dans les tableaux de bord froids de la gestion, mais il s’éprouve en le vivant.
L’entrepreneur de Schumpeter n’est pas l’homme du calcul ou du profit. Il " crée sans répit " parce qu’il est mû par un ensemble de mobiles irrationnels dont les principaux sont : la volonté de puissance, le goût sportif de la victoire, la joie de créer et donner forme à ses conceptions (François Perroux, 1993). Pour atteindre ses buts, il doit souvent vaincre des résistances, s’opposer aux circonstances. Il est celui qui est capable de sortir des routines pour faire des combinaisons nouvelles favorisant le surgissement de l’innovation : innovation produits, de procédés, de technique inédite, de marchés…
La renaissance illustre parfaitement cet idéal type. Les navigateurs, comme Christophe Colomb, Vasco de Gama, ne se sont pas contentés du confort douillet des honneurs de la cour. Leur volonté de découvrir le monde et d’ouvrir de nouveaux espaces commerciaux était plus forte que tout. Ils ne concevaient leur accomplissement personnel qu’à travers l’aventure.
Comme les explorateurs de cette époque les entrepreneurs sont visiblement animés par les mêmes valeurs d’aventure et de liberté. Diverses enquêtes menées par le CCA (Centre de Communication Avancée) et la Cofremca ont confirmé que la motivation première d’un entrepreneur était le besoin d’indépendance et d’autonomie.
Ces valeurs entrent en contradiction avec les valeurs dominantes de la société actuelle qui semble, paradoxalement, face à l’angoisse du lendemain et un monde complexe, plus que jamais se tourner vers des valeurs de sécurité et d’ordre. C’est sans doute ce qui explique l’opposition fréquente que peut rencontrer un entrepreneur lorsqu’il expose son projet, sollicite des fonds ou pire encore lorsqu’il échoue.
8. Quelques interrogations sur la formation de nos élites
A la lumière de ces quelques lignes, l’entrepreneur apparaît comme une figure salvatrice indispensable à notre développement économique. Cette fonction, d’ailleurs, ne peut se limiter à seule sphère économique. Ceux qui créent du bien être pour leurs concitoyens, ceux qui contribuent au développement de leurs connaissances comme ceux qui œuvrent à diminuer leur misère devraient être aussi considérés comme tels.
Des chercheurs renommés (Stiglitz, 2005 - Meda, 2000) nous invitent déjà à reconsidérer notre conception de la " Valeur " sous un angle plus globale que celui que les financiers nous ont jusqu’à présent imposé. Le PIB et les indicateurs quantitatifs associés ne seront bientôt plus suffisants pour mesurer la richesse d’un pays. La création de valeur doit être désormais envisagée sous un angle beaucoup plus global. Le Bonheur Intérieur Brut fait aussi partie de la création de richesse d’un pays. L’entreprenariat a donc une fonction sociale déterminante pour l’évolution d’une société.
Il est par ailleurs difficile de cantonner la notion d’entreprenariat à la seule création d’entreprise. Il existe aussi " l’intraprenariat " à l’intérieur des entreprises.
Mais alors si l’entrepreunariat, quelle que soit sa forme, est une fonction si vitale pour une nation et pour les organisations qui la composent, pourquoi notre système éducatif produit-elle si peu d’entrepreneurs ? Selon certaines études, 60% des entrepreneurs seraient des autodidactes. Même si ce chiffre diminue, on peut effet être étonné de ce nombre.
Patrick Fauconnier (1996) avance un chiffre encore plus étonnant sur le nombre d’étudiants d’écoles de commerce qui décident de se lancer dans la création d’entreprise à la sortie de leurs études. Ils semblent pourtant, en théorie du moins, les mieux équiper pour se lancer dans l’aventure. Ils ne seraient d’après ses informations que de 3%.
Il se demande si nous ne formerions pas trop de gestionnaires et pas assez d’entrepreneurs. Les compétences gestionnaires reposent sur des fondements complètement opposés aux compétences entrepreneuriales. Les premières visent à favoriser la rationalité, la maîtrise, l’ordre, la prudence tandis que l’entrepreneur doit précisément faire preuve d’intuition, d’adaptabilité, de créativité et d’audace. Cette question est d’autant plus préoccupante que l’économie aura besoin demain de managers innovants et inventifs pour trouver des sources de différenciation à offrir aux clients. Pour sortir de ce dilemme, il estime qu’il devient urgent de transformer " nos écoles de gestion en écoles d’entrepreneurs ".
Il ne faudrait pas seulement selon lui apprendre à réfléchir mais aussi apprendre à agir. Il propose pour cela une pédagogie qui devrait prendre en compte au moins 7 dimensions :
- L’imagination
- La curiosité
- La souplesse
- Le sens pratique
- L’esprit d’équipe
- L’audace
- L’humilité
D’autres auteurs (Morin 2000, Lebraty (2008), partagent ce point de vue et invitent les dirigeants à adopter de nouveaux modes de raisonnement pour naviguer dans la nouvelle réalité complexe et incertaine du monde dans lequel nous sommes brusquement entrés.
De nombreuses grandes écoles ont pris conscience de ces contradictions et ont fait évoluer leur pédagogie en :
- Valorisant les responsabilités associatives de leurs étudiants.
- Leur proposant d’accompagner en vraie grandeur des entrepreneurs en création d’activités ou en développement de projets (projet " Pépinières " de l’ESC Clermont).
- Offrant des enseignements complémentaires en histoire, psychologie, sociologie, philosophie, géopolitique, éthique, etc..considérés à tort comme les " sciences molles " du management.
- Organisant de nombreux travaux de groupes ou de projets.
- Alternant enseignement académique théorique et expériences en entreprise.
Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour passer restaurer la noble figure de l’entrepreneur trop souvent encore confondue avec celle du gestionnaire. Au-delà de sa fonction économique, rappelons simplement qu’il contribue à :
- Créer des emplois à partir d’activités économiques.
- Favoriser le lien social en rassemblant des individus en communauté.
- Procurer aux individus une identité en leur confiant des rôles et des responsabilités.
- Satisfaire les besoins d’un marché en produisant des produits et des services correspondants à une demande réelle.
- Faire vivre un territoire.
Il est temps en effet de sortir de la confusion entre le gestionnaire qui administre et l’entrepreneur qui transforme le monde. Sans son action, dans quel monde serions-nous ?
Des chercheurs renommés (Stiglitz, 2005 - Meda, 2000) nous invitent déjà à reconsidérer notre conception de la " Valeur " sous un angle plus globale que celui que les financiers nous ont jusqu’à présent imposé. Le PIB et les indicateurs quantitatifs associés ne seront bientôt plus suffisants pour mesurer la richesse d’un pays. La création de valeur doit être désormais envisagée sous un angle beaucoup plus global. Le Bonheur Intérieur Brut fait aussi partie de la création de richesse d’un pays. L’entreprenariat a donc une fonction sociale déterminante pour l’évolution d’une société.
Il est par ailleurs difficile de cantonner la notion d’entreprenariat à la seule création d’entreprise. Il existe aussi " l’intraprenariat " à l’intérieur des entreprises.
Mais alors si l’entrepreunariat, quelle que soit sa forme, est une fonction si vitale pour une nation et pour les organisations qui la composent, pourquoi notre système éducatif produit-elle si peu d’entrepreneurs ? Selon certaines études, 60% des entrepreneurs seraient des autodidactes. Même si ce chiffre diminue, on peut effet être étonné de ce nombre.
Patrick Fauconnier (1996) avance un chiffre encore plus étonnant sur le nombre d’étudiants d’écoles de commerce qui décident de se lancer dans la création d’entreprise à la sortie de leurs études. Ils semblent pourtant, en théorie du moins, les mieux équiper pour se lancer dans l’aventure. Ils ne seraient d’après ses informations que de 3%.
Il se demande si nous ne formerions pas trop de gestionnaires et pas assez d’entrepreneurs. Les compétences gestionnaires reposent sur des fondements complètement opposés aux compétences entrepreneuriales. Les premières visent à favoriser la rationalité, la maîtrise, l’ordre, la prudence tandis que l’entrepreneur doit précisément faire preuve d’intuition, d’adaptabilité, de créativité et d’audace. Cette question est d’autant plus préoccupante que l’économie aura besoin demain de managers innovants et inventifs pour trouver des sources de différenciation à offrir aux clients. Pour sortir de ce dilemme, il estime qu’il devient urgent de transformer " nos écoles de gestion en écoles d’entrepreneurs ".
Il ne faudrait pas seulement selon lui apprendre à réfléchir mais aussi apprendre à agir. Il propose pour cela une pédagogie qui devrait prendre en compte au moins 7 dimensions :
- L’imagination
- La curiosité
- La souplesse
- Le sens pratique
- L’esprit d’équipe
- L’audace
- L’humilité
D’autres auteurs (Morin 2000, Lebraty (2008), partagent ce point de vue et invitent les dirigeants à adopter de nouveaux modes de raisonnement pour naviguer dans la nouvelle réalité complexe et incertaine du monde dans lequel nous sommes brusquement entrés.
De nombreuses grandes écoles ont pris conscience de ces contradictions et ont fait évoluer leur pédagogie en :
- Valorisant les responsabilités associatives de leurs étudiants.
- Leur proposant d’accompagner en vraie grandeur des entrepreneurs en création d’activités ou en développement de projets (projet " Pépinières " de l’ESC Clermont).
- Offrant des enseignements complémentaires en histoire, psychologie, sociologie, philosophie, géopolitique, éthique, etc..considérés à tort comme les " sciences molles " du management.
- Organisant de nombreux travaux de groupes ou de projets.
- Alternant enseignement académique théorique et expériences en entreprise.
Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour passer restaurer la noble figure de l’entrepreneur trop souvent encore confondue avec celle du gestionnaire. Au-delà de sa fonction économique, rappelons simplement qu’il contribue à :
- Créer des emplois à partir d’activités économiques.
- Favoriser le lien social en rassemblant des individus en communauté.
- Procurer aux individus une identité en leur confiant des rôles et des responsabilités.
- Satisfaire les besoins d’un marché en produisant des produits et des services correspondants à une demande réelle.
- Faire vivre un territoire.
Il est temps en effet de sortir de la confusion entre le gestionnaire qui administre et l’entrepreneur qui transforme le monde. Sans son action, dans quel monde serions-nous ?
Présentation de l'auteur :
JC Casalegno est professeur permanent en Management et Développement des Ressources Humaines au groupe ESC Clermont où il dirige également le Mastère Spécialisé en Management Européen et Développement des Ressources Humaines. Il a par ailleurs été consultant pendant plus d'une vingtaine d'années, notamment dans le cadre de l'Institut de l'Expansion où il s’est spécialisé dans l’accompagnement social de PME à forte croissance.
Bibliographie :
Anzieu D, Martin J-Y (2007), La dynamique des groupes restreints,397 p
Aubert N, V. de Gaulejac (2007), Le coût de l’excellence, Editions du Seuil, 342 p
Bastide R. (2003), Le rêve, la transe, la folie, Edition du Seuil, 313 p
Baverez N. (2004), La France qui tombe, Edition Librairie Académique Perrin, Collection Tempus, 136 p
Bergson H. (2003), La pensée et le mouvant, Edition PUF, 291 p
Blanc C. (2004), Pour un écosystème de la croissance, Rapport au premier Ministre, Edition La Documentation Française, 81 p
Boutinet J.P (2004), Anthropologie du Projet, Edition PUF, 405 p
Casalegno JC (1997) Etude - Action " Création d’emplois et émergence de projets économiques dormants ", Rapport DRTEFP Auvergne, 43 p.
Chaize J. et Torres F. (Dir) (2008), Repenser l’entreprise, Edition Le Cherche-Midi, 344 p
Chevalier F., Michaëlli I, (2008) Comment devient-on innovateur ? Etude exploratoire sur une population de chercheurs-entrepreneurs, Congrès AGRH Dakar Juillet 2008
Desroche H. (1973), Sociologie de l’espérance, Edition Calman Levy, 279 p
Diel P (2002), Psychologie de la motivation, Edition Payot, 434 p
Fauconnier P. (1996), Le talent qui dort, Editions du Seuil, 299 p
Fauvet J-C, Fourtou J-R (2004), L'élan sociodynamique, Edition d'Organisation, 355 p
Enriquez E. (1999), Les jeux du pouvoir et du désir dans les organisations, Edition Desclée de Brouwer, 411 p
Fauvet J-C et Fourtou J-R (1985), La passion d’entreprendre, Les éditions d’Organisation, 162 p
Hegel G.W.F (2002), Phénoménologie de l’Esprit, Edition Gallimard, collection Folio, 799 p
Lebraty J. ( 2008), Etre entrepreneur au XXI° siècle, in Repenser l’entreprise, Edition Le Cherche – Midi, pp 106-122
Lupasco S. (1987), Le principe d’antagonisme et la logique de l’énergie, Edition du Rocher, collection L’esprit et la matière, 137 p
Maine de Biran P. (1995), Maine de Biran, La vie intérieure, Edition Payot, 307 p
Meda D. (2000), Qu’est-ce que la richesse ?, Edition Flammarion, 425 p
Morin E. (2000), Les 7 savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Edition du Seuil, 130 p
Perroux F. (1993), Oeuvres complètes, tome 6 : Théorie et histoire de la pensée économique : Marx, Schumpeter, Keynes, Edition Presse Universitaire de Grenoble, 424 p
Sartre J.P (1996), L’existentialisme est un humanisme, Edition Gallimard, 108 p
Stiglitz J.E (2005), Quand le capitalisme perd la tête, Edition LGF - Collection " Livre de Poche ", 571 p
Trouve Ph (1999), " Stratégies concurrentielles et comportements d'emploi dans les PME. Un état de la littérature ", Documents d'Etudes, n° 26, avril, 57 p.
Aubert N, V. de Gaulejac (2007), Le coût de l’excellence, Editions du Seuil, 342 p
Bastide R. (2003), Le rêve, la transe, la folie, Edition du Seuil, 313 p
Baverez N. (2004), La France qui tombe, Edition Librairie Académique Perrin, Collection Tempus, 136 p
Bergson H. (2003), La pensée et le mouvant, Edition PUF, 291 p
Blanc C. (2004), Pour un écosystème de la croissance, Rapport au premier Ministre, Edition La Documentation Française, 81 p
Boutinet J.P (2004), Anthropologie du Projet, Edition PUF, 405 p
Casalegno JC (1997) Etude - Action " Création d’emplois et émergence de projets économiques dormants ", Rapport DRTEFP Auvergne, 43 p.
Chaize J. et Torres F. (Dir) (2008), Repenser l’entreprise, Edition Le Cherche-Midi, 344 p
Chevalier F., Michaëlli I, (2008) Comment devient-on innovateur ? Etude exploratoire sur une population de chercheurs-entrepreneurs, Congrès AGRH Dakar Juillet 2008
Desroche H. (1973), Sociologie de l’espérance, Edition Calman Levy, 279 p
Diel P (2002), Psychologie de la motivation, Edition Payot, 434 p
Fauconnier P. (1996), Le talent qui dort, Editions du Seuil, 299 p
Fauvet J-C, Fourtou J-R (2004), L'élan sociodynamique, Edition d'Organisation, 355 p
Enriquez E. (1999), Les jeux du pouvoir et du désir dans les organisations, Edition Desclée de Brouwer, 411 p
Fauvet J-C et Fourtou J-R (1985), La passion d’entreprendre, Les éditions d’Organisation, 162 p
Hegel G.W.F (2002), Phénoménologie de l’Esprit, Edition Gallimard, collection Folio, 799 p
Lebraty J. ( 2008), Etre entrepreneur au XXI° siècle, in Repenser l’entreprise, Edition Le Cherche – Midi, pp 106-122
Lupasco S. (1987), Le principe d’antagonisme et la logique de l’énergie, Edition du Rocher, collection L’esprit et la matière, 137 p
Maine de Biran P. (1995), Maine de Biran, La vie intérieure, Edition Payot, 307 p
Meda D. (2000), Qu’est-ce que la richesse ?, Edition Flammarion, 425 p
Morin E. (2000), Les 7 savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Edition du Seuil, 130 p
Perroux F. (1993), Oeuvres complètes, tome 6 : Théorie et histoire de la pensée économique : Marx, Schumpeter, Keynes, Edition Presse Universitaire de Grenoble, 424 p
Sartre J.P (1996), L’existentialisme est un humanisme, Edition Gallimard, 108 p
Stiglitz J.E (2005), Quand le capitalisme perd la tête, Edition LGF - Collection " Livre de Poche ", 571 p
Trouve Ph (1999), " Stratégies concurrentielles et comportements d'emploi dans les PME. Un état de la littérature ", Documents d'Etudes, n° 26, avril, 57 p.