
En 2023, la France a réduit son déficit courant à 1 % du PIB, contre 1,2 % en 2022. Le déficit commercial, lui, est passé de 132,8 milliards d’euros à 76,1 milliards. Des chiffres qui pourraient donner à croire que la compétitivité française est sur de bons rails. Pourtant, le Cinquième rapport du Conseil national de la productivité (CNP) alerte : ces signes positifs masquent une vulnérabilité persistante, surtout en matière de compétitivité hors prix. Or c’est bien là que se joue la compétition industrielle et commerciale de demain.
Compétitivité prix : un souffle venu de l'industrie
La baisse des coûts salariaux dans le secteur manufacturier français – désormais inférieurs à ceux de l’Allemagne – a permis de regagner quelques parts de marché à l’export. Ces efforts s’appuient sur des réformes engagées depuis 2020, comme la réduction des impôts de production (3,2 milliards d’euros en moins en 2023), et la maîtrise des hausses salariales dans l’industrie.
Mais ce redressement reste partiel. Dans des secteurs comme les services aux entreprises ou le transport de marchandises, les coûts salariaux français demeurent supérieurs à ceux observés en Italie ou en Espagne, affectant l'ensemble de la chaîne de valeur. Ces secteurs, pourtant essentiels comme intrants industriels, risquent de faire basculer l’équilibre retrouvé si leur dynamique reste inchangée.
Compétitivité hors prix : le vrai chantier
L’essentiel est ailleurs. Le rapport est clair : la compétitivité hors prix française est insuffisante. Sur les échanges de produits manufacturés (hors énergie), la France conserve un déficit supérieur de 20 milliards d’euros à son niveau de 2019. Les secteurs déficitaires en 2023 restent les mêmes qu’en 2019 : informatique, optique, métallurgie, bois, textile. Ces secteurs partagent un point commun : ils souffrent d’un positionnement de gamme trop moyen et d’une différenciation limitée.
L'analyse croisée des données du Trésor et de la Banque de France montre que les produits français sont perçus comme trop chers pour leur niveau de qualité. En clair, la valeur perçue n’est pas au rendez-vous. Ce déséquilibre entre prix et qualité perçue explique la vulnérabilité des produits français face à la concurrence italienne ou chinoise, plus agressive sur le rapport qualité/prix.
À retenir : sur les segments à forte valeur ajoutée, c’est la productivité des entreprises qui tire les parts de marché, comme en Allemagne. Sur les segments à faible valeur ajoutée, c’est la maîtrise des coûts qui fait la différence. La France, trop centrée sur le milieu de gamme, perd sur les deux tableaux.
Un retard technologique préoccupant:
La compétitivité hors prix repose aussi sur la capacité d’innovation, l’usage de technologies avancées, et l’image de marque. Or, sur ces dimensions, la France est en retard. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- En 2023, seulement 57 % des entreprises françaises déclaraient utiliser une technologie numérique avancée, contre 73 % aux États-Unis.
- Les dépenses en R&D représentent 2,2 % du PIB en France, contre 3,1 % en Allemagne et 3,5 % aux États-Unis.
- La France est absente du top 10 mondial des entreprises technologiques. L’Europe n’en compte que 4 sur 50.
- Même constat sur la robotisation : si les grandes entreprises industrielles s’équipent correctement, les PME restent à la traîne, faute de moyens ou de compétences pour adopter l’IA, la fabrication additive ou la réalité augmentée.
- Les dépenses en R&D représentent 2,2 % du PIB en France, contre 3,1 % en Allemagne et 3,5 % aux États-Unis.
- La France est absente du top 10 mondial des entreprises technologiques. L’Europe n’en compte que 4 sur 50.
- Même constat sur la robotisation : si les grandes entreprises industrielles s’équipent correctement, les PME restent à la traîne, faute de moyens ou de compétences pour adopter l’IA, la fabrication additive ou la réalité augmentée.
De la logique de coût à la logique de valeur
Le message du CNP est sans ambiguïté : la France doit sortir de l’impasse du tout-coût. Miser sur la seule compétitivité prix est une stratégie à court terme, fragile face à la volatilité des prix de l’énergie ou des matières premières. À l’inverse, une montée en gamme structurelle permettrait de
- Réduire la sensibilité aux fluctuations de prix,
- Augmenter les marges à l’export,
- Renforcer la résilience industrielle face à la concurrence asiatique ou américaine.
- Augmenter les marges à l’export,
- Renforcer la résilience industrielle face à la concurrence asiatique ou américaine.
Cela suppose une politique offensive sur plusieurs leviers :
- Accélérer les investissements dans l’innovation de rupture, via le programme France 2030.
- Développer les compétences en design, IA, data et robotique au sein des PME.
- Structurer des filières à haute valeur ajoutée, en renforçant les écosystèmes régionaux.
- Et surtout : valoriser la marque France sur le terrain de la qualité, de la durabilité, et de l’utilité sociale des innovations.
- Développer les compétences en design, IA, data et robotique au sein des PME.
- Structurer des filières à haute valeur ajoutée, en renforçant les écosystèmes régionaux.
- Et surtout : valoriser la marque France sur le terrain de la qualité, de la durabilité, et de l’utilité sociale des innovations.
Quel cap pour les dirigeants ?
Pour les dirigeants, ce rapport est plus qu’un tableau de bord. C’est un appel à la lucidité stratégique. La France est à un tournant : consolider les gains récents ou retomber dans ses fragilités anciennes.
Il est donc urgent :
Il est donc urgent :
- de repositionner les offres sur des segments à forte différenciation,
- d’adopter une culture de l’innovation hors prix (design, expérience, éco-performance),
- et d’investir dans l’attractivité perçue autant que dans l’efficience interne.
- d’adopter une culture de l’innovation hors prix (design, expérience, éco-performance),
- et d’investir dans l’attractivité perçue autant que dans l’efficience interne.
La compétitivité hors prix, ce n’est pas du Luxe ! . C’est la clé de voûte d’un modèle économique durable
Conclusion: En finir avec l'idéologie de la compétitivité Prix
Politiques et médias nous martèlent à longueur de journée qu’il faudrait « travailler plus, plus longtemps » et « alléger les charges sociales ». Cette rhétorique, en apparence pragmatique, nous pousse en réalité à foncer tête baissée contre le mur d’une concurrence mondialisée féroce, dont les règles sont dictées par le dumping social et environnemental.
Or, c’est un leurre. L’enjeu, s’il est encore temps de le relever, se situe ailleurs : dans la compétitivité hors prix, dans l’innovation, la qualité, la valeur ajoutée et l’exportation maîtrisée.
C’est cette conviction que nous défendons depuis plus de 30 ans, après avoir accompagné des centaines d’entreprises. Nous avons vu disparaître celles qui misaient uniquement sur la réduction des coûts et sur la logique du moins-disant. À l’inverse, nous avons vu émerger et résister celles qui ont fait le pari de l’intelligence collective, du design, de la différenciation et de l’ancrage territorial.
Mais les stéréotypes ont la vie dure. Malgré les preuves accumulées, les orientations politiques restent figées dans une vision court-termiste, héritée d’un autre siècle. Pendant ce temps, les dégâts s’accumulent : désertification industrielle, précarisation du travail, perte de souveraineté économique, misère sociale et ....destruction de la planète !
Il est urgent de changer de logiciel. Valoriser les savoir-faire, réinventer nos modèles économiques, miser sur l’innovation incrémentale et de rupture : c’est là que se joue l’avenir. Pas dans une course absurde vers le moins-disant, mais dans une montée en gamme collective, durable et partagée.
Or, c’est un leurre. L’enjeu, s’il est encore temps de le relever, se situe ailleurs : dans la compétitivité hors prix, dans l’innovation, la qualité, la valeur ajoutée et l’exportation maîtrisée.
C’est cette conviction que nous défendons depuis plus de 30 ans, après avoir accompagné des centaines d’entreprises. Nous avons vu disparaître celles qui misaient uniquement sur la réduction des coûts et sur la logique du moins-disant. À l’inverse, nous avons vu émerger et résister celles qui ont fait le pari de l’intelligence collective, du design, de la différenciation et de l’ancrage territorial.
Mais les stéréotypes ont la vie dure. Malgré les preuves accumulées, les orientations politiques restent figées dans une vision court-termiste, héritée d’un autre siècle. Pendant ce temps, les dégâts s’accumulent : désertification industrielle, précarisation du travail, perte de souveraineté économique, misère sociale et ....destruction de la planète !
Il est urgent de changer de logiciel. Valoriser les savoir-faire, réinventer nos modèles économiques, miser sur l’innovation incrémentale et de rupture : c’est là que se joue l’avenir. Pas dans une course absurde vers le moins-disant, mais dans une montée en gamme collective, durable et partagée.
Bibliographie
Consulter le 4e rapport du CNP du Conseil national de la Productivité
Le chapitre 2 nous a particulièrement inspiré sur le thème de la Compétiivté; Il confirme des intuitions que nous évoquons depuis le début de ce webmagazine.
Le chapitre 2 nous a particulièrement inspiré sur le thème de la Compétiivté; Il confirme des intuitions que nous évoquons depuis le début de ce webmagazine.