Temps de Travail et stratégie

Depuis le début des années 2000, un phénomène inquiétant touche de nombreuses organisations françaises : la montée du stress au travail, corrélée à une chute progressive de la productivité et du PIB. Plusieurs études mettent en évidence le lien entre cette souffrance croissante et les choix stratégiques effectués par les entreprises. Le modèle de compétitivité prix, fondé sur la réduction des coûts et l'intensification du travail, est remis en question.


1. Un modèle fondé sur l'intensification du travail

Ce modèle repose sur l'idée que l'accroissement du temps et de l'effort de travail mène naturellement à une amélioration de la performance. En réalité, il produit souvent l'effet inverse : stress, désengagement, perte de sens, dégradation des collectifs de travail. Le travail devient une source d'épuisement plus qu'un levier de création.


2. Une souffrance au travail comme symptôme d’un modèle épuisé

Dès le milieu des années 2000, la souffrance au travail devient systémique. Parallèlement, la productivité commence à stagner, puis à chuter. La disparition des espaces de dialogue, de lien humain, de sens partagé, est un indicateur clé de cette dégradation. L’entreprise cesse alors d’être un lieu de co-construction pour devenir un lieu de pression et de fragmentation.


3. Le masochisme économique français :

La stratégie française fondée sur la compétitivité prix est largement inspirée d'une logique anglo-saxonne d'ajustement par le bas. Elle sacrifie l'investissement humain, l'innovation qualitative, la coopération. Elle s'accompagne d'un discours politique culpabilisant où la souffrance au travail est perçue comme une preuve de mérite. Le célèbre slogan « Travailler plus pour gagner plus » en est l'illustration. Cette logique relève d'un imaginaire sacrificiel et inefficace.


4. Comparaison européenne : produire mieux en travaillant moins:

Les pays d’Europe du Nord (Suède, Pays-Bas, Allemagne) illustrent un modèle alternatif. Le temps de travail annuel y est inférieur à celui de la France, mais le PIB par habitant y est nettement plus élevé. Ces pays misent sur la coopération, la qualité de vie au travail, la confiance et l’autonomie. La richesse s’y crée par l’intelligence collective, non par l’épuisement individuel.

Le lien entre la souffrance au travail et les choix stratégiques montre la nécessité de changer de paradigme. Il est temps de sortir d'une logique masochiste du travail pour construire des organisations humaines, efficaces et durables. Cela passe par le retour du sens, de la coopération et de l’autonomie dans les collectifs.


"Quand nous devons redoubler d’effort, c’est que peut – être tout simplement nous ne sommes plus dans la bonne direction…."